Sunday, December 03, 2006

Citation du 4 décembre 2006

Dans tout sourire il y a de l'enfance ; c'est un oubli et un recommencement.
ALAIN - 81 chapitres sur l'esprit et les passions



Léonard de Vinci - Sainte Anne la Vierge et l’enfant (détail)

Quand on sourit, qu’est-ce qu’on fait ?
Demandons à Léonard de Vinci, qui est le spécialiste reconnu du sourire : de celui de la Joconde qu’on ne reproduira pas ici (1), aux sourires en cascade de Sainte Anne (la grand-mère), la Vierge (la mère) et l’enfant Jésus.
Le mieux serait de laisser chacun interpréter ce qu’il ressent en face de ce tableau….
Pour ceux qui veulent poursuivre leur lecture, je dirai que je suis quant à moi frappé par le fait que le sourire qui correspond à l’affirmation d’Alain est celui de Sainte Anne et non celui de la Vierge, ni celui de l’enfant Jésus. Dans le groupe constitué par la Vierge et l’enfant, les sourires se répondent : elle sourit à son enfant ; l’enfant sourit à sa mère. Il s’agit d’un échange. En revanche, Saint Anne ne sourit à personne : entendez que son sourire est l’expression de ses sentiments devant le spectacle que lui offre ces deux personnages qui ne la regardent pas. Il ne s’agit donc pas d’une relation, mais d’un état.
Or, dans la citation d’Alain, le sourire est précisément un état, il est l’expression d’une harmonie immédiate entre celui qui sourit et le monde qui l’environne : c’est en ce sens qu’il est celui de l’enfant, du petit qui sourit, bien heureux dans son berceau, ne sachant même pas qu’il y a au monde une mère qui le veille, un sourire pour répondre à son sourire.
Pour Sainte Anne, la maternité de la Vierge est-elle un oubli et un recommencement ? L’idée sommaire serait de dire : oui, elle oublie qu’elle est grand mère ; elle recommence l’histoire de sa propre maternité. Mais ce serait un contre sens par rapport à la pensée d’Alain : cet oubli est celui des réalités de la vie ; ce recommencement est celui d’une plongée aux sources mêmes de l’existence, cet état de bonheur inconscient où l’organisme est en parfait équilibre avec le milieu. C’est l’état du nourrisson qui n’a pas oublié le bonheur de la vie utérine. Oui ; il faut remonter jusque là.
Quant on sourit, on se retrouve l’état prénatal.
(1) Je vous laisse le soin de dire si ce qui va suivre s’applique ou non au sourire de la Joconde (je veux dire : son sourire est-il du même ordre que celui de Sainte Anne ?)

No comments: