Monday, February 12, 2007

Citation du 13 février 2007

Les veuves vivent plus longtemps que leurs conjoints.

Jean-Pierre Raffarin - 2005.

Ah, là là ! Qu’est-ce qu’on peut dire comme bêtise quand on parle tout le temps… Et puis il suffit de tronquer la citation, d’isoler ce qui n’est qu’une formule maladroite pour en faire aussitôt une raffarinade de la plus belle eau…

Mais ne soyons pas trop sévère : de tout temps, les veuves ont excité la verve de nos auteurs, à commencer par notre Rabelais national. Dans le Gargantua, ch.3, il affirme que les veuves qui sont enceintes portent leur enfant 11 mois ; et donc, pendant les 3 mois qui suivent le décès de leur mari, «les femmes veuves peuvent librement jouer du serrecroupière ». Elles ne se contentent pas de vivre plus longtemps ; la vie, elles en jouissent mieux et plus longtemps.

Et cela, c’est un thème constant dans la littérature et dans l’histoire. La Veuve joyeuse n’est pas seulement un titre d’opéra comique, c’est une réalité dans la France d’ancien régime. On arrive ainsi à la condition féminine, dont on sait que ce Blog est un ardent défenseur.

La veuve est la seule femme libre dans la France d’ancien régime. La jeune fille est passée de l’autorité du père à celle du mari ; celle qui n’est pas mariée est au couvent, sous l’autorité de la Mère Supérieure. Mais la veuve, à supposer qu’elle ne soit pas contrainte à entrer dans les ordres, est libre de ses biens, et elle peut vivre conformément à sa volonté. En bref, la femme n’est libre que lorsque les hommes sont sortis de sa vie.

On n’imaginait pas la veuve se remarier. Imaginez un peu la veuve Clicquot, qui épouse en secondes noces Aristide Morin – l’amour, ça ne se discute pas – voilà son champagne rebaptisé : « Épouse Morin » ? Non, n’est-ce pas : il s’appellerait Aristide Morin, point final… Tout simplement, parce que la veuve a un prestige dont l’épouse ne peut pas jouir : elle a le pouvoir de gérer ses biens, ce que l’épouse ne peut pas faire.

Ah !... L’Ancien Régime, c’était le bon temps… Celui où on disait : « Jeunes filles, mariez-vous, et puis…trucidez votre époux ! »

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