Wednesday, March 28, 2007

Citation du 29 mars 2007

Il est beau de ne pratiquer aucun métier, car un homme libre ne doit pas vivre pour servir autrui.

Aristote - Rhétorique

Voilà une citation dont on serait tenté de se détourner d’un haussement d’épaule : voilà bien, dirait-on, une pensée d’esclavagiste, qui assimile le travail à un statut social - le servage.

Bien sûr, mais regardons-y à deux fois avant de jeter l’eau du bain : le bébé n’y serait-il pas resté ?

- D’abord, il y a cette idée, que si le travail est toujours pour servir autrui, c’est parce qu’on ne peut se contenter de consommer ce qu’on produit soi-même. Il s’agit donc du travail social : il ne s’agit pas de faire pousser ses salades pour les manger avec les œufs de sa basse-cour. Il s’agit d’échanger ces produits avec ceux d’autres producteurs pour arriver à satisfaire tous les besoins de la vie. Si le travail limite ma liberté, c’est parce que je ne peux travailler que si en face il y a quelqu’un pour acheter mon produit. Combien d’étudiants en philo (mais aussi en psycho) se sont avec dépit rendu compte que la philo, décidément, y a pas d’acheteurs pour ça ? Voilà une idée.

- Maintenant, deuxième idée : pour être libre, il ne faut pas travailler pour autrui. Et si je ne travaille pas pour autrui, je ne travaille pas du tout ? Ça dépend. Si je travaille pour moi-même, je suis libre, mais à condition que ce travail ne serve pas à satisfaire des besoins, mais serve à développer mes capacités. En effet : je fais pousser des salades : si c’est pour me nourrir, mon travail n’est pas libre, puisque je n’ai pas le choix, sa finalité (= me nourrir) étant contrainte par la nature (les besoins) de mon corps. Mais si c’est pour apprendre comment vivent des plantes, pour développer mon intelligence et élargir ma vision du monde, alors, oui : là je suis libre, parce que mon action n’a que moi-même pour fin. Seulement, Aristote n’appelle pas ça du travail ; il appelle ça du loisir.

Alors, jeunes gens, restez le plus longtemps possible chez papa-maman, c’est là que vous serez les plus libres.

Et tant que vous y êtes, votez pour le candidat qui vous promet la retraite à 50 ans (heu, non : 40 ans).

5 comments:

Anonymous said...

Etait-il donc si égoiste ce monsieur Aristote ?
Si je comprends bien, selon lui, il est beau d'être libre (je ne suis pas sûre de ça) et il est "moche" de servir autrui (pas sûre de ça non plus).
Un homme riche comme Crésus, qui a gagné une fortune au loto par exemple, et qui ne s'inquiète que de sa petite personne est donc quelqu'un de bien ? Un tel homme est-il heureux ? Sans doute au début mais après ? Il lui viendra peut être une question à l'esprit "quelle est ma raison de vivre ?"
L'excès de loisirs...je ne suis pas sûre que l'on apprécierait.

"jeunes gens, restez le plus longtemps possible chez papa-maman, c’est là que vous serez les plus libres." Vous n'étiez pas quelque peu pressé de quitter papa-maman à un certain âge, d'être indépendant, d'avoir votre petit appart ? On n'a pas plutôt l'impression d'être libre justement en "coupant le cordon ombilical" ?

La retraite à 40 ans...faut voir. Un salaire pour la femme au foyer ? Ce serait bien. Au fait, est-ce que c'est un métier, être femme au foyer ?

Autre question qui me vient à l'esprit...des femmes philosophes, ça existe (ou cela a-t-il existé) ?

PS : Si vous préférez me répondre par mail, cela me va. (et si vous ne tenez pas particulièrement à me répondre...ben, tant pis :))

Jean-Pierre Hamel said...

- Etait-il donc si égoïste ce monsieur Aristote ?.. L'excès de loisirs...je ne suis pas sûre que l'on apprécierait.
Re. : Aristote ne s’intéresse pas à ceux qui sont riches : il s’intéresse à ce qu’on fait de sa richesse : si elle sert à nous distraire et à jouir comme des pourceaux : alors cela n’a rien à voir avec la liberté. Si on obtient grâce à elle de devenir plus cultivé ou plus fort sur ses jambes en prenant le temps de faire du sport ; en bref, si tout ce que nous faisons nous rend meilleur, entendez : nous permet de réaliser une de nos potentialités cachées, alors, c’est bon.
Reste que la liberté physique n’est qu’un condition ami d’autres pour cette liberté-là
-Vous n'étiez pas quelque peu pressé de quitter papa-maman à un certain âge, d'être indépendant, d'avoir votre petit appart...
Re. : Bien sûr, l’ironie était transparente : mais je ne faisais que pointer une situation absolument courante, qu’avait thématisé le fils « Tanguy » : après tout tous ces jeunes qui s’accrochent aux basques des parents, ils ne sont pas si malheureux que ça : ils ont le sentiment d’être libres. Quant à moi, j’étais jeune avant 1968 : à l’époque la première liberté c’était de quitter la famille, justement pour être libre.
- Un salaire pour la femme au foyer ? Ce serait bien. Au fait, est-ce que c'est un métier, être femme au foyer ?
Re. : Voyez mon Post : si vous considérer la fonction sociale de la femme au foyer, c’est un métier. Si vous considérez qu’elle assume plutôt un désir intime, alors non.
- Autre question qui me vient à l'esprit...des femmes philosophes, ça existe (ou cela a-t-il existé) ?
Re. : Voyez mes différents Posts sur la condition féminine. En gros, des femmes philosophes, il y en a eu à partir du 17 et surtout du 18ème siècle : mais toujours cautionnées par un homme (la Princesse Elisabeth et Descartes, madame Duchâtelet et Voltaire). Sur le déni de la rationalité des femmes, voir mon Post du 8 mars.
PS : Si vous préférez me répondre par mail,...
Re. : D’accord pour l’envoi par mail, mais je n’ai pas votre adresse.

Anonymous said...

Merci pour votre réponse.
C'est vrai, il doit y avoir des réponses à mes questions dans votre blog, il faudrait que je le lise en entier avant de poser davantage de questions.
Vous n'avez pas mon adresse email ? Je vous ai pourtant envoyé un message l'autre jour (à l'adresse que vous m'avez indiqué). Je ne comprends pas. Je vais refaire une tentative.
Bon week end.

Jean-Pierre Hamel said...

A tout hasard, mon adresse est :
jeanpierre.hamel@gmail.com

Anonymous said...

Oui, c'est bien l'adresse à laquelle je vous avais envoyé un premier mail. Je vous en ai envoyé un deuxième hier, mais apparemment cela s'est soldé à nouveau par un echec, alors je vous donne cette fois mon adresse (au cas où...)
mylaganlove@hotmail.fr