Thursday, October 23, 2008

Citation du 24 octobre 2008


Un roman n'est intéressant que si son auteur se remet en question et s'expose à ce qu'on lui dise : " C'est illisible”.

Le Clézio - Extrait d’une interview dans Paris Match - Novembre 2000

C’est illisible : oui, tant qu’on n’a pas déchiffré cette langue inconnue qui constitue la substance du roman. Prenez la Recherche du temps perdu. Tant que vous n’aurez pas franchi les 50 premières pages, allez-vous y comprendre quelque chose ? Probablement pas.

Allez vous trouver anormal d’être obligé d’apprendre à lire cette langue ? Peut-être.

- Ne devrions-nous pas nous révolter contre cette difficulté, d’autant plus que parfois elle ne sert qu’à recouvrir bien des gouffres d’inanités ? Pourquoi un roman ne devrait-il pas être lisible de bout en bout ? Puisque l’auteur – ici Le Clézio, un prix Nobel tout de même – est si génial, que n’adapte-t-il pas notre langage à sa pensée sans en faire un chiffre abscons ?

- Oui, mais : si dans le langage de tous les jours on ne pouvait écrire que des platitudes ? Et si, supposé qu’on essaye d’adapter la Recherche avec un langage de coin de rue, on n’arrivait qu’à des banalités sans intérêts ?

Tiens, faites une petite expérience : allez voir une encyclopédie des citations (comme celle-ci), et cherchez justement les citations lisibles qui sont extraites des romans de Le Clézio. Voici ce que vous trouverez :

- Il s'arrêta et descendit de son vélo. Il mit en place l'antivol sur la jante de la roue avant.

Le Clézio – La Fièvre (1965)

- Il alla chercher une petite voiture et se mit à la faire rouler autour des pieds de Bresson, en faisant «brououououm, broum» pour imiter le ronflement d'un moteur.

Le Clézio – Le Déluge (1966)

- Et pourtant je ne fais rien. Je laisse aller.

Le Clézio – L'Extase matérielle (1967)

- Ensuite il allume le feu avec son briquet à amadou en faisant bien attention à mettre la flamme du côté où il n'y a pas de vent.

Le Clézio Désert (1980)

Lisible, n’est-ce pas ?

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