Wednesday, November 26, 2008

Citation du 27 novembre 2008


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Plutarque dit en quelque lieu, qu'il ne trouve point si grande distance de bête à bête, comme il trouve d'homme à homme…. j'enchérirais volontiers sur Plutarque ; et dirais qu'il y a plus de distance de tel à tel homme qu'il n'y a de tel homme à telle bête…
Montaigne - Essais - Livre I - ch. XLII De l'inégalité qui est entre nous (1)
Il y a plus de différence d'homme à homme, que d'homme à bête.
Pierre Charron – De la sagesse, I, ch.35 p.215 (Amaury-Duval)
Car, bien que Montaigne et Charon aient dit qu'il y a plus de différence d'homme à homme, que d'homme à bête, il ne s'est toutefois jamais trouvé aucune bête si parfaite, qu'elle ait usé de quelque signe, pour faire entendre à d'autres animaux quelque chose qui n'eût point de rapport à ses passions; et il n'y a point d'homme si imparfait, qu'il n'en use; en sorte que ceux qui sont sourds et muets, inventent des signes particuliers, par lesquels ils expriment leurs pensées.
Descartes – Lettre au marquis de Newcastle 23 novembre 1646

Pour qui réfléchirait en lisant ce blog au bon usage des citations, voici de quoi alimenter sa réflexion.
Montaigne cite Plutarque, Charron cite Montaigne (sans le dire mais était-ce nécessaire entre amis ?) et Descartes cite et Montaigne et Charron.
Outre que ces citations interrogent l’attitude des philosophes sur l’animal – et on se rappelle peut-être l’excellent livre d’Elisabeth de Fontenay sur la question (1) – on constate qu’il y plusieurs point de vue sur le rapport entre l’homme et l’animal ; et chacun de ces points de vue est un problème fondamental concernant la nature humaine (2).
- Y a-t-il entre l’homme et l’animal une différence de degré (Plutarque et Charron) ou bien une différence de nature (Descartes) ? Et dans ce cas là quelle est cette nature ? (En cause l’âme, attribuée ou refusée aux animaux.)
- Mais Montaigne, qui reprend la thèse de Plutarque, en profite pour s’interroger sur quelque chose de plus : quel est le critère qui permet d’évaluer les hommes ? La merveille est que les soit disantes qualités qui distinguent les hommes entre eux sont tellement fantastiques et imaginaires que oui, effectivement entre un roi et un paysan il y a plus de différence qu’entre celui-ci et le chien de la ferme.
Alors voilà à quoi on arrive : les citations ne sont pas ce qui remplace la pensée ni ce qui la confirme (le parapluie qui nous abrite de la contestation), mais bien ce qui donne à penser.
D'ailleurs, les Essais ont été conçus initialement par Montaigne comme le recueil des réflexions qu'il dégageait des citations de ses lectures grecques et latines.
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(1) Elisabeth de Fontenay – Le silence des bêtes. La philosophie à l’épreuve de l’animalité. Paris (Fayard) 1999
(2) On n’évoquera pas ici la définition aristotélicienne de l’homme « animal politique » étant entendu que l’animal dont il parle ici est un genre, et non ce qui réfère à l’animalité

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