Citation du 30 novembre 2008
Le bonheur pour tous – Leçon 3
A quoi bon exécuter des projets, puisque le projet est en lui-même une jouissance suffisante ?
Baudelaire – Les projets (Petits poèmes en prose, n°24)
Avis à tous les feignants, les velléitaires, les nonchalants, les mous, les versatiles.
Vous aussi vous pouvez être heureux.
Quelle différence faites-vous entre un projet et le même projet exécuté ?
La différence est simple : un projet peut être aussi fantastique qu’on voudra si l’on n’a pas la nécessité de le réaliser. Un projet exécuté est obligatoirement conforme à la réalité. Dans ce poème en prose, Baudelaire imagine la femme aimée dans divers cadres, un palais, une case sous les alizés, une auberge proprette…
Logiquement, seul le dernier projet serait réalisable, du moins pour Baudelaire. Mais voyez vous, celui-ci pas plus que les autres ne lui semble bon à réaliser. Car ces trois projets ont été trois rêves qui lui ont apporté autant de plaisir les uns que les autres. A quoi bon réaliser un projet, si c’est le plaisir qui est notre but ? Si nous ne recherchons pas à laisser une trace inaltérable après nous, gravée dans le marbre de la réalité, il n’est pas nécessaire de passer à l’acte.
La ligne de crête du plaisir, ce n’est pas un but, c’est une guide. C’est lui notre GPS, c’est lui qui nous dit s’il faut tourner à gauche ou à droite.
Or, selon Baudelaire, l’imagination est bien plus efficace pour nous apporter du plaisir que la réalité. La sagesse (invoquée du reste dans ce petit poème) a toujours été de se rendre indépendant du réel. C’est bien ce qui se dit ici.
Quand à Freud, qui a su avec la théorie du fantasme rendre compte de la source véritable de la jouissance, il a semble-t-il loupé la sagesse en considérant que le détour par la réalité était malgré tout nécessaire.
Pour être heureux, il n’est vraiment pas nécessaire d’être raisonnable.
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