Sunday, March 08, 2009

Citation du 9 mars 2009

Notre époque obsédée par l'instantanéité est myope. Elle croit avoir tout inventé et être l'aboutissement de tout et elle regarde le passé d'un oeil au mieux condescendant.

Jean Dion – Le Devoir (journal québécois) - 10 Décembre 2000

Ce genre de remarque est très courant et en même temps très décevant.

Très courant, parce que c’est de nos jours une banalité de gémir sur l’oubli du passé et de la tradition, oubli que nous payons par les pires égarement qui nous conduisent à refaire exactement les mêmes erreurs que nos ancêtres : nous n’avons décidément rien appris.

Mais aussi, très décevant : tant qu’à faire de dénoncer la myopie qui nous affecte, prenons-là au sens stricte : elle nous empêche non pas de nous retourner vers la passé (ça serait plutôt de l’arthrose cervicale), mais bien de voir au loin, c’est à dire vers le futur.

Ça y est : vous voyez où je veux en venir je suppose ?

La crise ! Oui, la crise (1)… Nous avons le nez dessus, obsédés par ce qu’elle va être demain matin, quelles souffrances, quelles restrictions elle va nous apporter. Et comme faire pour en éviter les effets.

Mais avons-nous le souci de deviner sur quel monde elle va déboucher ? Y aura-t-il un après, différent de l’avant ? Suffira-t-il de régler quelques détails pour que tout reparte ? Y a-t-il une soif du profit, inscrite dans les gènes de l’humanité, qui nous interdirait tout changement ? Ou, au contraire, l’homme issu de sa propre histoire doit-il prendre celle-ci à bras le corps pour lui imposer un virage radical ?

On pourrait au moins se poser la question. Dans les années 60-70, on pensait souvent en terme de révolution. Ce n’était pas très réaliste, ça j’en conviens. Mais au moins, ça évitait la myopie.

Au fond le problème, c’est de regarder au loin et d’y voir clair.

Fra-ter-ni-té, ou Pro-fi-ta-tion ?


(1) Il y aurait toute une étude à faire sur l’usage de l’idée de crise à chaque tournant de siècle.

Ainsi, au tournant du 19ème et du 20ème siècle, c’était la crise de la civilisation européenne qui agitait beaucoup les esprits. En philosophie, on a gardé le souvenir du texte de Husserl (un peu plus tardif il est vrai : 1935), La crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale.

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