Friday, July 10, 2009

Citation du 11 juillet 2009

Ce que cache mon langage, mon corps le dit. Mon corps est un enfant entêté, mon langage est un adulte très civilisé…

Roland Barthes – Fragments d’un discours amoureux

- Je t’aime mon amour… Je t’aime de toute mon âme !

- Dis donc, si j’en crois ce que je sens là en me serrant contre toi, ce n’est pas seulement avec ton âme que tu m’aimes…

On l’aura compris : on peut taire, mais on ne peut s’empêcher de signifier.

Bon. Maintenant la question est : y a-t-il des choses qu’on tait non pas parce que c’est défendu de le dire, mais parce que le langage est impuissant à le faire. Et, si oui, le corps peut-il prendre le relais ?

Les psys nous laissent croire que tout ce qui se dit non par la langue mais par le corps relève de la pathologie : les petits boutons sur la figure, les douleurs dans le dos, etc…

Quant à moi, je crois au contraire que le corps signifie en permanence, que son langage est celui non seulement des expressions du visage, mais encore celui des postures, de la démarche, de la moiteur des mains, du bondissement du cœur, etc…Ce que dit le langage est re-dit par le corps.

Seconde question : dans l’expression corporelle qui redouble la parole, est ce que sont les mêmes choses qui se disent ?

Déjà, remarquons que le corps ne ment pas. Les fameux détecteurs de mensonge sont des appareils qui justement captent ces signaux émis par le corps dont on peut décrypter la signification.

Ensuite, notons que les signes du corps ne sont pas arbitraires comme ceux du langage (1). Ils sont fonctionnels, et même si on n’entend pas forcément par là quelque chose d’aussi adapté à une fonction précise qu’avec l’exemple cité plus haut de l’amour, ils sont constitués de réactions solidaires de l’état psychologique.

Il est évident que le corps est parfaitement adapté lorsqu’il s’agissant de traduire des émotions. Mais qui dit que ce n’est pas le cas pour signifier des pensées plus abstraites ? Qu’un philosophe ou qu’un mathématicien se mette à danser pendant leur cours sur les catégories de Kant ou sur les dérivées de je ne sais quoi ?

Vous haussez les épaules ? Et pourtant c’est exactement ce que faisaient les pédagogues grecs.


(1) Selon Ferdinand de Saussure, le signe linguistique est arbitraire, c'est-à-dire qu'il n’est pas "motivé" à la différence des symboles qui ont pour particularité de ne jamais être "tout à fait arbitraire". (Source : Wikipedia)

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