Un roi, réalisant son incompétence, peut soit déléguer, soit abdiquer. Un père ne peut ni l'un, ni l'autre.
Marlène Dietrich
C’était autrefois la mode de fustiger la démission des parents devant des enfants qui importunaient tout le monde. Erreur on ne peut plus totale : démissionner, déléguer, abdiquer, le roi peut faire – mais le père ne le peut pas. Même incompétent, même s’il fait semblant de l’ignorer, il reste en charge des responsabilités de la paternité. Faut-il préciser que la mère est dans la même situation ?
Quelle est donc cette responsabilité si fondamentale que rien ne peut lui donner congé ?
Vaste question que je ne saurais résoudre tout à fait, mais pour la quelle j’ai une anecdote qui pourrait mettre sur la piste de la réponse.
J’ai eu une élève (18 ans – classe terminale) qui depuis sa jeune enfance avait été confiée par la DASS à différentes familles d’accueil et qui était aidée matériellement et soutenue affectivement par les élèves de la classe. Tout le monde connaissait sa triste histoire et tout le monde veillait sur elle. Un jour au cours d’un débat (dont j’ai oublié le propos, mais il s’agissait de ce genre de discussion qu’on peut avoir en classe de philosophie), voilà qu’elle jette à toute la classe : « Un enfant abandonné reste toujours génétiquement, socialement et affectivement, un étranger. »
Un enfant abandonné reste un enfant sans famille. Même choyé, même adoré dans sa famille d’accueil, il est toujours un invité. La responsabilité d’un père – et bien évidemment d’une mère – c’est donc déjà ça : donner à l’enfant un foyer, c’est à dire un endroit où il soit chez lui, un lieu où il soit enraciné – et non transplanté.
Je crois que c’est ça que veut dire Marlène Dietrich – c’est ça qu’on ne peut ni déléguer ni refuser. Mais en même temps il n’est pas trop difficile de satisfaire à une pareille exigence…
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