La Cour n'est pas là pour trancher si Dominic Ongwen est un
homme bon ou cruel.
Fatou
Bensouda (Avocate gambienne, procureure générale de la Cour pénale
internationale)
On lira en note (1) les crimes dont Dominic Ongwen est
accusé. Notons simplement que son cas soulève un dilemme : d’une part,
ayant été un « enfant soldat », il se présente comme une victime de
la guerre civile en Ouganda ; mais d’autre part, devenu chef de l’Armée de
résistance du seigneur, il est accusé de crimes de guerre et de crimes contre
l’humanité.
On retrouve une problématique bien connue : le fait
d’avoir été victime peut-il excuser les crimes commis ensuite ? Fatou
Bensouda le dit fortement : le tribunal doit juger les faits commis et non
la nature de la personne qui les a commis. Qu’importe que le criminel soit
bon ? Et d’ailleurs personne ne sait ce que cela veut dire : est-on
meilleur pour avoir été subi la cruauté des autres, dès lors qu’on fait subir les
mêmes violences à d’autres personnes ?
- Fatou Bensouda ne rentre pas dans ce débat : selon
elle, au moment où un crime a été commis, la seule question qui compte c’est de
savoir qui en est la cause efficiente. Si quelqu’un a renversé un piéton pour
avoir dérapé sur le verglas, il n’est pas cause efficiente, dans la mesure où il
n’était pas en puissance de connaître la situation. Par contre s’il avait été
averti et que néanmoins ait conduit sans prendre les précautions nécessaires
pour ne causer aucun accident, là il est responsable. Et qu’importe qu’il ait
été à ce moment préoccupé par je ne sais quelle raison ?
Le tribunal des hommes n’est pas là pour sonder les cœurs et
les reins. Il n’est pas là pour damner ou sanctifier les hommes qui
comparaissent devant lui : cela, c’est le rôle du Jugement Dernier qui est
tout sauf un jugement humain, même si on y pèse les actes commis durant le vie,
car c’est alors l’intention qui compte.
Rogier
van der Weyden – La pesée des âmes par l’archange Michel – Retable du Jugement
Dernier aux Hospices de Beaune, 1443-1452
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(1) « Enlevé vers l’âge de 14 ans par les hommes de
Joseph Kony, dans le nord de l’Ouganda, l’enfant soldat (= Dominic Ongwen) est ensuite devenu l’un des commandants de la
redoutable Armée de résistance du Seigneur. Accusé de crimes contre l’humanité
et crimes de guerre commis entre 2002 et 2005 dans le nord de l’Ouganda,
Dominic Ongwen a plaidé non coupable et s’est présenté en victime. » Lire
la suite ici.
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