Friday, December 09, 2016

Citation du 10 décembre 2016

La Cour n'est pas là pour trancher si Dominic Ongwen est un homme bon ou cruel.
Fatou Bensouda (Avocate gambienne, procureure générale de la Cour pénale internationale)

On lira en note (1) les crimes dont Dominic Ongwen est accusé. Notons simplement que son cas soulève un dilemme : d’une part, ayant été un « enfant soldat », il se présente comme une victime de la guerre civile en Ouganda ; mais d’autre part, devenu chef de l’Armée de résistance du seigneur, il est accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
On retrouve une problématique bien connue : le fait d’avoir été victime peut-il excuser les crimes commis ensuite ? Fatou Bensouda le dit fortement : le tribunal doit juger les faits commis et non la nature de la personne qui les a commis. Qu’importe que le criminel soit bon ? Et d’ailleurs personne ne sait ce que cela veut dire : est-on meilleur pour avoir été subi la cruauté des autres, dès lors qu’on fait subir les mêmes violences à d’autres personnes ?
- Fatou Bensouda ne rentre pas dans ce débat : selon elle, au moment où un crime a été commis, la seule question qui compte c’est de savoir qui en est la cause efficiente. Si quelqu’un a renversé un piéton pour avoir dérapé sur le verglas, il n’est pas cause efficiente, dans la mesure où il n’était pas en puissance de connaître la situation. Par contre s’il avait été averti et que néanmoins ait conduit sans prendre les précautions nécessaires pour ne causer aucun accident, là il est responsable. Et qu’importe qu’il ait été à ce moment préoccupé par je ne sais quelle raison ?
Le tribunal des hommes n’est pas là pour sonder les cœurs et les reins. Il n’est pas là pour damner ou sanctifier les hommes qui comparaissent devant lui : cela, c’est le rôle du Jugement Dernier qui est tout sauf un jugement humain, même si on y pèse les actes commis durant le vie, car c’est alors l’intention qui compte.


Rogier van der Weyden – La pesée des âmes par l’archange Michel – Retable du Jugement Dernier aux Hospices de Beaune, 1443-1452
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(1) « Enlevé vers l’âge de 14 ans par les hommes de Joseph Kony, dans le nord de l’Ouganda, l’enfant soldat (= Dominic Ongwen)  est ensuite devenu l’un des commandants de la redoutable Armée de résistance du Seigneur. Accusé de crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis entre 2002 et 2005 dans le nord de l’Ouganda, Dominic Ongwen a plaidé non coupable et s’est présenté en victime. » Lire la suite ici.

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