Wednesday, December 07, 2016

Citation du 8 décembre 2016

Ne votez pas avec votre tête – l’esprit est stupide et le cerveau est faible. Faites confiance à vos tripes : agissez par instinct et puis votez.
Beppe Grillo – Leader du mouvement « Cinq étoiles »
(Libé du 3-4 décembre p. 14)
Les italiens ont-ils écouté Grillo en refusant le référendum de Mateo Renzi ? Mes compétences politiques étant insuffisantes je ne saurais répondre, mais j’admets que c’est tentant de le penser.
Maintenant, est-ce la spécialité de la droite populiste que de savoir jouer avec les émotions et les passions populaires ? Là aussi, on serait tenté de répondre « oui » tant ces tribuns manœuvrent l’opinion en exaltant des sentiments tels que la haine ou l’amour, la crainte ou la hardiesse.
Mais voilà : à dénoncer de tels artifices présents à l’extrême droite, ne risque-t-on pas d’oublier de vérifier si par hasard ils ne seraient pas également présents dans les autres partis politiques considérés comme plus « honorables » ?
Mais pourquoi accabler les politiciens supposés manipulateurs et menteurs ? Le DRH n’en fait-il pas autant ? Et l’instit avec les gamins ? Et Maman avec Bébé, et Monsieur avec Madame ?....
Nous touchons là un des ressorts de la vie contemporaine qui va bien au-delà de la vie politique : c’est le jeu des émotions sur le quel se construit la plupart des rapports humains actuels, qu’il s’agisse des rapports affectifs ou des rapports marchands en passant justement par les rapports de pouvoir. En ce sens, Beppe Grillo donnerait une directive parfaitement inutile parce que redondante : nous n’agissons de toute façon qu’avec nos tripes, même si nous dénommons « acte réfléchi »  ce qu’elles nous poussent à faire.
Et puis, pourquoi ne s’intéresser qu’à la vie actuelle ? Si c’était comme ça depuis que l’évolution a doté notre cerveau de deux amygdales considérées comme l’un des principaux centres impliqués dans la vie émotionnelle ? Si les circuits de la récompense ou bien ceux de la peur étaient derrière chaque pensée comme elle est derrière chaque action ? Si la haine tout comme la compassion étaient en dernière instance nos ressorts, et qu’il suffise donc d’agir sur eux pour obtenir le résultat escompté ? Ne serions-nous pas dans ce que Guy Debord nommait La société du spectacle ?
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N.B. Notons que la société du spectacle décrit le stade avancé de l’aliénation capitaliste, lorsque la marchandisation de la vie sociale est arrivée à son terme et que, pour devenir marchandise, tout est  noyé dans une idéologie économique : tout s’achète et tout se vend. Simplement c’est via une sphère de manifestations audio-visuelle (mais aussi politiques et économiques) que s’opère cette transformation.

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