Saturday, September 16, 2006

Citation du 17 septembre 2006

Le sommeil de la raison engendre des monstres
Francisco Goya




Cette citation figure en espagnol sur l’accotement de la table où dort le personnage. Il existe une version dessinée de cette gravure, légendée par Goya, précisant qu’il se représente ici lui-même rêvant. Il ajoute encore que le but de cette œuvre est de nous engager à nous prémunir par le contrôle de la raison des monstruosités que sont les vulgarités - de l’imagination - indignes de l’œuvre d’un artiste.
On voit où il veut en venir : les fantasmes qui vont tant exciter les surréalistes ne sont que vulgarités, déchets de la pensée humaine, et ils doivent être soumis à la censure de la raison c’est à dire mis en rapport avec la réalité. Le réalisme serait le sens ultime de cette belle formule ; à lire donc ainsi: « Le sommeil de la raison n’engendre que des monstres ».
Reste à savoir si cette œuvre dit bien ce que son auteur veut lui faire dire. Quant à moi je vois un homme endormi, certes, mais qui est assiégé par des monstres (à plumes ou à poils) qui s’abattent sur lui, qui le pressent de toute part. Lorsque notre raison s’endort, nous sommes dans l’angoisse, parce que la part obscure de notre être reprend le pouvoir. Autrement dit, ce que suggère cette gravure, ce n’est pas une conception de l’œuvre, mais une représentation de la condition humaine.
Nous serions alors dans la lignée de Shakespeare ; c’est Macbeth qui regrette l’innocence du sommeil, bain de pureté devenu inaccessible en raison du meurtre qu’il a commis. Si la raison doit nous protéger de nous mêmes, c’est que nous sommes nous-mêmes les monstres dont nous nous effrayons tant. Le péché originel n’est également pas loin. La perte du sommeil comme conséquence de la faute (Cf. le crime de Caïn, Citation du 2 avril 2006), n’est donc qu’un aspect du mal ; le sommeil du coupable est bien plus épouvantable.

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