Wednesday, April 23, 2008

Citation du 24 avril 2008

Pourquoi ma connaissance est-elle bornée ? Ma taille ? Ma durée à cent ans plutôt qu'à mille ? Quelle raison a eue la nature de me la donner telle, et de choisir ce nombre plutôt qu'un autre, dans l'infinité desquels il n'y a pas plus de raison de choisir l'un que l'autre, rien ne tentant plus que l'autre ?

Blaise Pascal Pensées

La philosophie est-elle l’art de poser des questions ? Est-elle l’art de transformer des questions que tout le monde comprend en questions que plus personne ne comprend (cf. Post du 18 avril) – histoire de ne pas être embêté par la réponse ?

Bon, si vous y tenez… Mais disons alors que la philosophie c’est aussi l’art de réfuter les questions qu’on n’a pas à poser.

--> Et c’est vrai que lorsque l’on compare la durée de notre vie à celle de la tortue – par exemple – on est déconcerté : comment se fait-il que l’homme, le sommet de la création, ne soit pas en même temps celui qui vive le plus longtemps – déjà que pour expliquer le fait qu’il meure on est obligé de faire intervenir un fait surnaturel (comme le péché originel) (1). Si je cherche la cause de la brièveté de la vie dans la nature (et non dans la Volonté impénétrable de Dieu), aucune cause déterminante ne peut s’y trouver, et comme rien n’arrive de rien, alors, non seulement on ne comprend pas pourquoi on ne vit pas plus longtemps, mais aussi pourquoi on meurt

La métaphysique, science des causes premières, a semble-t-il répondu à ces questions, donc a accepté de les accueillir. Mais en réalité, en même temps qu’elle y répondait, elle y mettait un terme. Qu’on conteste telle ou telle métaphysique : à savoir que c’est l’Esprit qui a créé la nature et que les imperfections qu’on y trouve sont la conséquence de cette création et non du Créateur ; ou qu’on considère que la nature est le fait du hasard et que les « imperfections » n’y sont que l’expression de notre attente et non d’une disposition qui en ordonne le contenu ; il n’en reste pas moins que choisir une réponse, c’est en même temps affirmer qu’il faut savoir arrêter, qu’après cette réponse, il n’y aura plus de « pourquoi », que les « pourquoi » ne sont donc pas en nombre infini, ou alors, comme le fait observer Pascal, qu’on n’aurait jamais dans ce cas la moindre réponse.

La question philosophique majeure n’est pas le « pourquoi » : pourquoi suis-je né comme-ci ou comme-ça ? - mais le « comment » : comment je fais avec ça ?- Ou si vous préférez, ce qui compte, c’est ce que j’arrive à faire avec ce qu’on a fait de moi.

C’est d’ailleurs cela, la définition de la liberté selon Sartre.

(1) La mort comme fait naturel est parfaitement explicable, direz-vous. Pas tant que ça : expliquez déjà pourquoi les cellules souches se divisent indéfiniment, de même que les cellules cancéreuses ? Qu’est-ce qui fait qu’un tissu vivant se dégrade et meurt, est-ce un bafouillage de la reproduction ou bien y aurait-il quelque part un gène létal ?

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