Thursday, April 02, 2009

Citation du 2 avril 2009

Si, par amour des bois, un homme s'y promène pendant la moitié de la journée, il risque fort de passer pour un fainéant. Si, au contraire, il emploie toutes ses journées à spéculer, à raser les bois et à rendre la terre chauve avant son heure, on le tiendra en haute estime, on verra en lui un homme industrieux et entreprenant. Est-ce donc qu'une ville ne porte d'intérêt à ses forêts que pour les faire abattre ?

Henry D. Thoreau – La vie sans principes (1863)


Et nous avons rendu « la terre chauve », et nous faisons mine de le découvrir alors qu’il y a un siècle et demi Thoreau nous avertissait de ce danger.

Danger, oui, car déjà dans Walden ou la vie dans les bois (son œuvre la mieux connue) Thoreau l’enseigne sans ambiguïté : l’homme est un animal dont la spiritualité s’épanouit dans la nature (foret, lacs) et dans le loisir.

Or, voilà deux chemins dont tout le XXème siècle nous a éloigné, malgré son avertissement.

D’abord nous travaillons jusqu’à l’épuisement complet de nos forces, il ne nous reste rien pour penser. A ce point que l’habitude venant, le temps libre n’est plus que le temps du divertissement (entertainment), et non celui du débat ou de la méditation.

Et surtout, la nature, la vraie nature, nous la fuyons. Même ce que nous appelons « nature » n’est en fait que production codée et soumise à toutes sortes de modes par nos jardiniers. Thoreau aine la nature « sauvage », la nature « désolée », celle des mares et des fonds de vallées humides ; celle des montantes et des précipices… La nature sans l’homme.

Bien sûr, nous pouvons le soupçonner de misanthropie. Mais au moins, il nous indique fortement la direction dans la quelle nous nous rendons. Lorsque Descartes disait que nous étions « comme maîtres et possesseurs de la nature », il parlait surtout de l’utilisation des forces de la nature, les vents, les rivières, le feu et l’eau.

Ce que pointe Thoreau, ce n’est pas l’utilisation de la nature, c’est sa consommation, ce processus qui détruit ce qu’il utilise.

Après avoir consommé les animaux, nous avons consommé les forêts. Maintenant il nous reste à consommer l’eau et l’air.

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