Monday, July 05, 2010

Citation du 6 juillet 2010

La tolérance est un moment provisoire. Elle permet à ceux qui ne s'aiment pas de se supporter mutuellement, en attendant de pouvoir s'aimer.

Vladimir Jankélévitch

On se perd en conjectures sur la tolérance dès qu’on tente de savoir si elle doit avoir une limite ou pas et comment en établir la légitimité.

Mais il y a un autre sujet de perplexité : doit-elle être provisoire ou définitive ?

- Définitive, elle l’est pour Voltaire, qui écrit : « Tolérance - Pardonnons-nous réciproquement nos sottises» (1), car quand on pardonne, c’est définitif.

- Provisoire selon Janké, parce qu’elle ne suffit pas et qu’elle n’est qu’un préalable à l’amour.

Autrement dit, la tolérance est une façon de rendre possible l’approfondissement des sentiments par la meilleure connaissance des gens. L’idée suggérée est que plus on connaît les gens et plus on les aime – et que pour ça, la tolérance est indispensable.

Il y a un certain intérêt à considérer la tolérance comme ça : ça permet de comprendre pourquoi on nous dit qu’il ne faut pas être hostile aux étrangers, et que si on se donne le temps de les connaître nous verrons s’évanouir ce rejet qui tient à la peur de la différence. Si au lieu de les rejeter nous acceptions avec tolérance leurs comportements, nous verrions qu’ils ne sont pas si différents de nous et alors nous pourrions les aimer.

La tolérance serait donc justifiée paradoxalement par le fait qu’elle serait provisoire, dans la mesure où elle doit déboucher sur une attitude plus positive et plus définitive.

Oui, mais : si au lieu de nous conduire à les aimer, la meilleure connaissance de nos semblables nous conduisait à les haïr ? Si les vieux – ceux qui sont misanthropes – étaient simplement venus à l’intolérance par l’observation assidue du comportement de leurs contemporains ? (2)

Nous aurions à réécrire la phrase de notre philosophe :

La tolérance est un moment provisoire. Elle permet à ceux qui ne s'aiment pas de se supporter mutuellement, en attendant de pouvoir s'aimer – ou d’arriver à se détester pour de bon.


(1) Voir Post du 17 février 2006

(2) "Plus je connais les hommes, plus j’aime mon chien" (voir ici)

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