Sunday, August 24, 2014

Citation du 24 août 2014

Et à quoi bon exécuter des projets, puisque le projet est en lui-même une jouissance suffisante ?
Charles Baudelaire – Le Spleen de Paris

Procrastinateur, mon ami, cette pensée est pour toi.
- Tu dois écrire une lettre importante pour ton avenir – une lettre de motivation, un C.V. ou quoi que ce soit du même genre. Mais tu es trop paresseux pour t’y mettre ; ou peut-être trop lâche pour l’envoyer après l’avoir écrite ? Ecoute donc Baudelaire : qu’est-ce qui va te faire le plus plaisir ? De t’imaginer entrain de l’écrire, ou bien de le faire réellement ?

Alors bien sûr, comment éprouver du plaisir à simplement imaginer ce qu’on doit faire ? Si on ne le fait pas, ça ne va pas apaiser l’angoisse du lendemain. Oui, demain, au réveil tu vas bien sûr te dire en ouvrant l’œil : et Pôle-Emploi ? Si je n’y vais pas : qui va payer le loyer ?
Les projets dont parle Baudelaire ne peuvent donc pas être simplement ceux qui visent la satisfaction des besoins naturels ; en fait, il y a toujours un moment difficile pour le procrastinateur : c’est l’épreuve de la réalité. Comment la contourner ? À quel moment pourrait-on dire que le plaisir d’imaginer la satisfaction est aussi intense que la satisfaction réelle ?
Qu’y a-t-il donc de si jouissif dans le projet ? On peut vouloir être encore plus fort que Diogène, celui qui, se masturbant sur  l’Acropole en plein midi, disait aux passants : Ah ! si seulement on pouvait calmer sa faim aussi facilement !
- Oui, plus fort que lui, on pourrait s’exclamer : sans les mains ! et jouir dans notre tête de nos fantasmes – ceux qui peuvent se satisfaire sur place, sans faire le détour par la réalité. Oui, on peut le dire… et puis mourir de faim quand même.


Le projet imaginé par Baudelaire est celui d’un poète, qui met en jeu l’imagination et le rêve. Il s’agit de jouir d’être l’homme qui a imaginé ce qu’il allait faire, qui s’est même rêvé le faisant… et qui est allé se recoucher.

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