Saturday, April 12, 2014

Citation du 13 avril 2014


Zig et zig et zig, quelle sarabande! / Quels cercles de morts se donnant la main ! / Zig et zig et zag, on voit dans la bande / Le roi gambader auprès du vilain!
Mais psit ! tout à coup on quitte la ronde, / On se pousse, on fuit, le coq a chanté / Oh ! La belle nuit pour le pauvre monde ! / Et vive la mort et l'égalité !
Poème d'Henri Cazalis (alias Jean Lahor)

Allez ! C’est Dimanche ! Un peu de musique pour le fun ? Une musique guillerette, une musique à écouter avec les pieds ? Une musique à chanter avec les paroles ci-dessus ?
Voilà : Camille Saint-Saëns et sa Danse macabre

C’est vrai que ça ne réjouit pas forcément tout le monde, mais enfin que voulez-vous ? Si on rit avec ça, alors on est sur de rire de tout – et tout le temps…
Mais qu’est-ce qui réjouissait tant nos ancêtres – je veux dire ceux qui au détour du 14ème siècle, en pleine épidémie de peste noire ont inventé et représenté ces sarabandes de squelettes qui poussent vers la tombe pêle-mêle mendiants et seigneurs empanachés ?

Danse de la mort Holbein
Oui, qu’y avait-il de si réjouissant ? Relisons notre citation : Et vive la mort et l'égalité. Oui, c’est bien ça qui caractérise ces Danses macabres : on y voit la mort mélanger  joyeusement tous les ordres de la société, toutes les classes, toutes les conditions. Riches ou pauvres, seigneurs ou manants, pouilleux ou belles emparfumées, tous se retrouvent dans la tombe qui égalise les conditions sans aucun égard pour les différences.
Sommes-nous donc bien sûrs d’être égaux devant la mort ? Si nous nous reportons à l’époque où ces sarabandes mortuaires sont apparues – je veux dire l’époque de la première épidémie de peste noire (1) – on constate que l’inégalité sociale restait la règle. C'est ainsi qu'on disait que le meilleur remède contre la peste était d’avoir une bonne paire de bottes – pour fuir quand il en  était encore temps : ce que tout le monde n’avait pas les moyens de faire. On aurait pu dire aussi que le second remède était la possession de hauts murs : les nobles dans leur propriété bien fermée, comme les moines dans leurs monastères risquaient beaucoup moins la contagion.
o-o-o
Et de nos jours ? Statistiquement, l’espérance de vie (et donc la crainte de mourir avant l’âge) est un indice de développement d’un pays. Les pauvres boliviens n’ont guère l’espoir de vivre au-delà de la cinquantaine, quand nous, nous fleuretons avec les 80 ans. Les pauvres meurent avant les riches, et c’est un indice non pas seulement de développement mais de justice sociale que de combler les inégalités devant la mort.
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(1) Rappelons que la 1ère épidémie atteignit l’Europe en 1347

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