Monday, April 28, 2014

Citation du 29 avril 2014



Le travail pense, la paresse songe.
Jules Renard – Journal
Commentaire I
La pensée, cette merveille qui fait de l’homme une créature unique, est aussi une puissante révélatrice de la nature humaine : c’est elle qui fait non seulement le sujet individuel (Je pense donc je suis), mais encore elle caractérise l’espèce : l’homme est un animal-pensant.
Seulement ce n’est pas tout. Car pour penser encore faut-il travailler, et non paresser : la paresse songe dit Jules Renard.
Qu’est-ce à dire ? Pas de pensée sans effort ? Et qu’apporte donc l’effort ? Une continuité orientée vers un but ? Un enchaînement efficace – donc logique ? Un résultat évaluable ?
Mais alors, question essentielle : à quel travail « songe » donc Jules Renard ? S’agit-il d’un travail spécifique à l’action de penser, ce que les philosophes entendent généralement quand ils parlent de « penser » comme d’une action propre à l’homme (dans le sillage de Descartes) ? Ou bien de ce qui accompagne tout travail, que ce soit celui du rat de bibliothèque – ou celui du terrassier ?
Et le terrassier, à quel moment pense-t-il ? Quand il manie sa pelle ou bien quand il reprend sa respiration, appuyé sur la manche de sa pelle ?
Quoiqu’il en soit, le travail spécifique à la pensée – nommons-le « travail intellectuel » –existe effectivement, car il engendre une fatigue bien particulière. C’est d’ailleurs  ce que les travailleurs manuels (comme par exemple les terrassiers) ont du mal à comprendre : comment peut-on être fatigué quand on a passé la journée entière assis sur sa chaise à gratter du papier (ou taper sur un clavier). Qu’est-ce que c’est que cette fatigue qui ne nous empêche pas d’aller courir 10 kilomètres en sortant du bureau ?
Il a fallu attendre jusqu’à aujourd’hui pour mieux comprendre ce qu’est la fatigue du cerveau, liée à la dépense de médiateurs chimiques qui ne se régénèrent que pendant le sommeil. Le cerveau est comme une pile qui se rechargerait la nuit et se déchargerait le jour.

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