Thursday, June 25, 2015

Citation du 26 juin 2015

Le capitaliste affirme, sournois : « C’est le destin qui fait les pauvres »
Hilal Naji
Justification de la pauvreté I
Voilà une affirmation qui appartient aux arguments qui prétendent imposer silence aux exigences de justice sociale : la société, disent-il, ne doit rien aux pauvres, parce que chacun n’a que le destin qu’il mérite. Aider les pauvres à être moins pauvres, c’est une perte de temps et d’argent. Ils sont ce qu’ils sont parce que c’était inévitable compte tenu de leur nature, de leur psychologie etc… On peut aussi ajouter à cette liste le destin pour clore une énumération qui serait inutile : « De toute façon, disent-ils, ce n’est pas nous – les riches – qui sommes responsables de cela. »
Développons un peu cette thèse : si ce n’est pas le capitaliste qui fait la pauvreté, alors d’où vient-elle ? Pas de l’inégale répartition des richesses, puisqu’alors il suffirait de révolutionner cette répartition pour que la pauvreté disparaisse. Pas de l’exploitation du travail humain avec extorsion de la plus-value, comme le prétendait Marx, puisqu’on prend pour hypothèse que le capital est innocent. Non, la pauvreté est un phénomène indépendant des riches, phénomène qui d’ailleurs est commun à ces deux classes : si c’est le destin qui fait les pauvres, alors c’est lui aussi qui fait les riches. Le riches, ils n’y peuvent rien : le destin s’est chargé de les rendre riches (ou de les rendre capables de créer des richesses) – et puis c’est tout.
Alors, nous voilà, nous les occidentaux libéraux avec un fatalisme aux saveurs orientales ? Les classes sociales sont comme les castes aux Indes : intouchable vous êtes né, intouchable vous vivrez – et intouchable vous mourrez !

Bien sûr que non : nous croyons qu’il y a forcément quelque chose à faire. Oui, même les libéraux de l’économie l’affirment : certes les inégalités sont inévitables, mais pas du tout parce que le destin l’impose ; c’est plutôt parce que c’est nécessaire au bon fonctionnement de la société. Que les riches soient riches parce qu’ils sont plus productifs, plus en entreprenants que les autres, voilà qui est non seulement normal, mais encore profitable à tous ! Car si vous voulez avoir une plus grosse part du gâteau, il ne faut pas vous emparer du couteau. Il suffit de aire grossir le gâteau.
Ainsi donc les pauvres doivent bénir les riches : grâce à eux ils seront bientôt toujours pauvres, certes, mais un peu moins.
Car pour faire des profits, il ne suffit pas de produire : il faut encore vendre !

Allez, les pauvres : les soldes sont commencées. Dépêchez-vous !

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