Thursday, April 28, 2011

Citation du 29 avril 2011

Nous voulons substituer, dans notre pays […] toutes les vertus et tous les miracles de la République, à tous les vices et à tous les ridicules de la monarchie.

Robespierre (voir texte en annexe)

Ceux qui répugnent à la facilité grimaceront en voyant apparaitre ici le nom de Robespierre. C’est qu’en effet, dès qu’on veut disqualifier une idée, on la cherche chez lui, c’est lui que l’on cite – et on ajoute triomphalement : « Voilà ce qui arrive quand on pense comme ça : la Terreur ! »

Bon – C’est vrai, mais en même temps où allons-nous trouver une source de réflexion sur l’entrecroisement de la morale et de la politique ? Avant la période révolutionnaire, la politique est affaire de naissance ; après elle est affaire de profit. Entre les deux citez si vous voulez Rousseau ou Saint Just. La différence (sous cet angle du moins) ne sera pas fondamentale.

Si nous faisons le recensement des vertus que Robespierre cherche à rétablir et des vices qu’il cherche à éteindre (comme énumérés dans le texte en annexe) nous ne pouvons qu’en être convaincus : qui donc ne souhaiterait la réussite d’un tel programme ?

Mais ce programme est un programme d’action politique. Là où Robespierre nous fait peur, c’est quand on songe aux moyens politiques de le réaliser. Faut-il éradiquer le vice pour que ne restent que les vertus ? Alors la machine à raccourcir les hommes va pouvoir fonctionner – et c’est ce qui s’est passé. Faut-il les transformer pour qu’ils deviennent ce qu’ils n’étaient pas : je veux dire vertueux ? Alors la dictature idéologique et la police religieuse vont se mettre en place.

Sommes-nous à l’abri de ce risque ? Si on se réfère à ce que je disais plus haut (= la bourgeoisie a mis le coffre-fort à la place du tabernacle) alors inutile de trembler : ce danger-là ne nous menace plus.

Mais… Même si l’histoire ne fait jamais machine arrière, il lui arrive de faire des loopings et, quitte à se ramasser en fin de boucle, certains n’hésitent pas à tenter l’aventure du virage moral en politique.

C’est même ce qui m’a fait frémir dans le discours du Chanoine de Latran… il y 4 ans.

C’est vrai que depuis notre bon chanoine nous a plutôt rassuré sur le chapitre du donneur de leçons morales. Mais je reste vigilant. Je vous préviendrai en cas de rechute.

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Annexe :

« Nous voulons substituer, dans notre pays, la morale à l’égoïsme, la probité à l’honneur, les principes aux usages, les devoirs aux bienséances, l’empire de la raison à la tyrannie de la mode, le mépris du vice au mépris du malheur, la fierté à l’insolence, la grandeur d’âme à la vanité, l’amour de la gloire à l’amour de l’argent, les bonnes gens à la bonne compagnie, le mérite à l’intrigue, le génie au bel esprit, la vérité à l’éclat, le charme du bonheur aux ennuis de la volupté, la grandeur de l’homme à la petitesse des grands, un peuple magnanime, puissant, heureux, à un peuple aimable, frivole et misérable, c’est-à-dire, toutes les vertus et tous les miracles de la République, à tous les vices et à tous les ridicules de la monarchie. »

Robespierre – Mercure français, 1794

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