1- L’esprit du capitalisme est un système de valeurs qui élève l’acquisition des richesses systématiquement recherchées par le travail acharné, la frugalité et l’épargne, à la dignité d’un mode de vie et d’un objectif final.
Max Weber, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, 1905
2 - Un acte économique sera dit « capitaliste » avant tout quand il repose sur l’attente d’un profit obtenu par l’utilisation de chances d’échange, quand il repose, donc, sur des chances de gain formellement pacifiques.
Max Weber, Avant-propos au Recueil d’études de sociologie des religions dans Sociologie des religions, 1922
3 - La soif d’acquérir, la recherche du profit, de l’argent, de la plus grande quantité d’argent possible, n’ont en elles-mêmes rien à voir avec le capitalisme […] L’avidité d’un gain sans limites n’implique en rien le capitalisme, bien moins encore son « esprit ». Le capitalisme s’identifierait plutôt avec la domination rationnelle de cette impulsion irrationnelle.
Max Weber, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, 1905
Alors que Notre-Président en pleine crise financière, souhaite injecter des valeurs morales dans la compagne électorale, il est peut-être utile de s’interroger :
Y a-t-il une morale du capitalisme ?
Marx définit le capitaliste comme celui qui réalise du profit, autrement dit qu’il lui suffit de détourner les fruits du travail du prolétariat – et puis c’est tout.
Weber, un demi-siècle plus tard, ajoute que ce profit suppose des conditions très particulières.
--> Si j’ai placé ici trois citations, c’est pour montrer combien ces conditions sont très étendues, et donc qu’il ne s’agit pas d’une liaison faible entre le capital et les exigences morales et politiques.
1 – Le profit doit être obtenu par le travail acharné, la frugalité et la dignité du mode de vie. Et on comprend que ces exigences affectent le capitaliste lui-même.
2 – Ce profit doit également être réalisé dans une situation d’échange, donc de façon pacifique. Les guerres – en particulier coloniales, avec les extorsions qui les accompagnent ne sont pas naturelles dans le capitalisme.
3 – Etre un capitaliste, c’est savoir dominer les impulsions irrationnelles qui pousseraient à de pareils excès.
On dira peut-être que tout cela, Marx l’avait déjà décrit sous le nom d’idéologie. Mais il faut relever ici une différence essentielle avec Marx : pour celui-ci, l’idéologie était une arme aux mains du capitaliste afin d’amener les dominés à supporter sans se rebeller leur situation. Il en faisait donc quelque chose qui était d’usage strictement externe : le capitaliste peut bien être immoral et athée pour lui-même, ça n’a pas d’importance, puisque ce qui compte c’est que ses ouvriers y croient.
Par contre on voit que selon Weber, il est de la plus haute importance que le capitaliste y croie lui aussi.
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