François Villon – Refrain de la Ballade des Dames du temps jadis (1461)
Alors que le France grelotte – tout comme une bonne partie de l’Europe, et sans doute une encore plus grande partie du monde – il est bon de fredonner un peu.
…Comme par exemple cette poésie de François Villon, reprise et puis mise en musique par Georges Brassens (avec il est vrai une strophe en moins).
On pourrait penser qu’il est un peu décalé de regretter les neiges d’antan au moment même où la neige, la vraie, la froide avec la bise qui souffle dessus, se trouve à nos portes. Sans doute. Mais ce n’est pas non plus un hasard si c’est ce poème de Villon qu’on a retenu depuis le 15ème siècle. La neige reste depuis lors le symbole (ou l’exemple) de la beauté enfuie et regrettée avec nostalgie.
La neige, comme la beauté des femmes se désagrège et disparait. Celle d’aujourd’hui ne remplacera jamais celle qu’on a perdue, et c’est là sans doute la morale de la Ballade de François Villon. Mais il ne s’agit pas seulement de célébrer les beautés enfuies ; il s’agit aussi de célébrer les femmes du temps jadis, celles qui ont été immortalisées dans la mémoire populaire pour leur beauté, mais aussi par leur héroïsme (Jeanne la bonne lorraine…) ou par leurs vices extraordinaires (« où est la roine / Qui commanda que Buridan / Fût jeté en un sac en Seine ? » (1)).
Bref : les neiges dont on rêve, celles dont on célèbre la beauté sont toujours les « neiges d’antan », jamais celles d’aujourd’hui.
Et les femmes d’aujourd’hui ne nous feraient donc pas rêver, en tout cas beaucoup moins que les femmes d’autre fois ? Là je ne suis plus d’accord. L’histoire regorge de femmes qui ont subjugué les hommes par leur beauté. Et quand on voit à quoi elles ressemblaient – ou bien comment on se les représentait autrefois – alors on se dit que nos beautés d’aujourd’hui sont bien plus convaincantes.
C’est qu’à la différence des actes héroïques et mémorables, la beauté féminine est tributaire des canons esthétiques du moment, et que si nos stars n’avaient sans doute pas eu le moindre succès autrefois, Dalila aujourd’hui, telle que peinte par Rubens en 1609, n’aurait eu aucune chance avec les Samson de maintenant.
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(1) C’est l’épisode de la Tour de Nesle, avec selon la légende, Jeanne de Bourgogne
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