Sans la pipe la vie serait aride, sans le cigare elle serait incolore, sans la chique elle serait intolérable !
Gustave FLAUBERT - Correspondance
Etes-vous comme moi un peu énervé par le consensus anti-tabac ?
« Tremblez, fumeurs, car vous creusez votre tombe avec votre clope ; mais, vous devez aussi rougir de honte, car vous êtes des criminels qui empoisonnent les autres . »
Voici un petit florilège :
On est dans le délire collectif, dans la folie purificatrice. Le mal existe, il est incarné par le fumeur ; sa seule existence est déjà un malheur. La preuve, il suffit qu’il y en ait un sur le trottoir pour qu’aussitôt certains prennent l’air dégoutté, se retenant tout juste de le pousser sous les roues du bus. Et pourtant, heureusement que le fumeur existe : grâce à lui on sait quoi faire pour éradiquer LE mal.
Essayons d’en sortir, demandons-nous pourquoi on fume ? On s’est déjà interrogé sur l’évaluation de la vie (1). Ici Flaubert fait plus simple : il ne s’agit pas de la vie entendue comme un tout lié à la nature essentielle de l’individu, mais plutôt de la saveur de la vie, de son feeling, étant entendu que ce qui lui donne de l’agrément est fort limité : c’est le tabac. Je crois que les non fumeurs ne comprennent pas ce qu’est le plaisir de fumer. Ils croient que c’est une dépendance et que le fumeur n’allume sa cigarette que pour échapper au désagrément du manque de nicotine. Il y a pourtant une curieuse exception : on admet que le fumeur de cigare (dont pourtant la fumée est jugée répugnante) éprouve un plaisir raffiné et exclusif - à condition qu’il s’agisse d’un Davidoff et qu’il s’accompagne d’un verre de cognac. Tiens, Davidoff, puisqu’on en parle ; lorsqu’il évoque le fumeur de cigare, il va encore beaucoup plus loin que Flaubert : "Il y a dans les gestes lents, dignes, mesurés du fumeur de cigare une cérémonie qui permet de retrouver des rythmes oubliés et de rétablir une communication avec soi-même." Rien que ça !
Snobisme que tout cela. Ecoutez Flaubert : la chique suffit au bonheur de l’homme. Trouvez plus simple, et venez me raconter ça : je suis preneur.
(1) C’était il y a deux jours. Vous avez déjà oublié ??
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