Devoir ! Ah, je ne puis souffrir ce vilain mot, cet odieux mot ! Il est si pointu, si aigre, si froid. Devoir, devoir, devoir ! On dirait des coups d'épingle.
Henrik Ibsen
En irait-il des mots comme des sons, qui donnent des images involontaires et colorées ? Nous voulons parler de ce phénomène connu sous le nom de synesthésie au quel nous avions consacré un Post le 25 octobre 2007, à l’aide du sonnet de Rimbaud sur les Voyelles.
Je ne sais pas exactement, tant ce phénomène reste mystérieux. En tout cas, il apparaît clairement qu’Ibsen fantasme sur le mot devoir : Devoir, si pointu, si aigre, si froid. Devoir = coup d’épingle…
Et vous, est-ce que les mots évoquent des images semblables en vous ? Je ne veux pas demander s’ils sont liés à l’évocation des circonstances dans les quelles vous les auriez entendus un fois. Non, il s’agirait plutôt – comme ici – de ces images qui naissent spontanément à l’écoute d’un mot, sans qu’il y ait un rapport nécessaire entre sa sonorité et l’image (d’ailleurs comment se dit devoir en norvégien ?).
Ces images attestent plutôt qu'il existe une fusion entre le sens et la sonorité – les phonèmes si on veut mieux dire – fusion d’ordre psychologique et personnelle, prouvant ainsi que notre rapport au langage et surtout à la langue maternelle, vient de zones profondes de notre psychisme.
C’est d’ailleurs sans doute ce qui caractérise le mieux la langue maternelle justement. Une telle langue n’est pas seulement celle que nous avons apprise dès notre naissance ; c’est aussi celle où il arrive que certains mots nous donnent des coups d’épingle.
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