Vérité révélée contre vérité argumentée, le débat est l'un des plus difficiles qui soit, précisément parce que la révélation exclut en principe l'idée même de débat.
Mireille Delmas-Marty – Le Monde de l'éducation - Juillet - Août 2001
Je ne sais sur quel sujet portait le débat au quel on fait ici allusion, mais une chose me paraît sûre : aucun débat ne peut se développer entre des gens supposant posséder la « vérité révélée ». Imagine-t-on un débat entre des adeptes de religions différentes, mais également révélées ? Entre un musulman et un chrétien ? Entre un chrétien et un juif ? Une telle supposition est effectivement ridicule.
Voilà pourquoi l’idée d’un débat sur l’identité nationale qui a agité la France pendant plusieurs mois a été un débat plutôt stérile.
Si en effet il ne peut y avoir débat, c’est parce que l’identité française, dont nous sommes en tant qu’individus l’expression, est notre substance et c’est la raison pour la quelle on ne peut s’en défaire pour l’examiner à distance, comme pour la comparer à d’autres objets du même genre. Débattre sur un tel sujet ne peut avoir aucun sens si on entend par là discuter pour savoir s’il faut accepter ou refuser d’intégrer tel ou tel élément à notre identité. (1)
Bien sûr, on peut à un très modeste niveau admettre le débat. Simplement, il doit avoir pour sens d’intégrer et non de « désintégrer » ces différences dans l’identité nationale.
…Sauf qu’il ne s’agit pas d’un débat, mais tout au plus de nouvelles recettes pour « vivre-ensemble ».
Le terme de recette paraît choquant ? Je comprends cela. Mais il faut alors entreprendre autre chose : quelque chose comme une étude scientifique de cette identité considérée sous l’angle culturel, examiner scientifiquement les compatibilités et les incompatibilités des différentes composantes de la culture française – savoir si par exemple en 2010 il est encore possible d’affirmer que la base de l’identité française est ethnique (2). Mais alors il ne s’agit plus de débats, mais d’argumentation historique et culturelle.
(1) Bien entendu j’admets fort bien que cette identité soit soumise à des changements au cours de l’histoire, changements qui d’ailleurs peuvent être très rapides. Mais il ne s’agit nullement de décision prises par des individus, mais une succession d’états subis par eux.
(2) Comme le soutenait il y a peu un chef de parti d’extrême droite en France.
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