Donner la liberté au monde par la force est une étrange entreprise pleine de chances mauvaises. En la donnant, on la retire.
Jean Jaurès - L'armée nouvelle
Plusieurs idées ce bousculent dans cette « pensée ».
Les unes frappées au coin du bon sens, telles que : la liberté ne se quémande pas, elle s’exige et elle se prend d’assaut s’il le faut. Du genre « L’émancipation du prolétariat sera l’œuvre du prolétariat ».
Ou bien ceci : la liberté n’est rien sans un contenu que seul l’individu peut définir. Donner la liberté aux autres, c’est leur imposer notre façon d’être libre, donc détruire celle qui serait la leur.
Mais surtout, donner la liberté par la force, c’est forcer à être libre des gens qui ne le veulent pas. Comme on ne peut abandonner tout à fait la liberté, il s’agit d’hommes dont la liberté a été de choisir l’esclavage. En les libérant de leurs chaînes, on les prive de ce que leur libre choix a voulu… Je ne sais pas si de telles personnes existent. Je crois plutôt que c’est inscrit dans un échange : je vous donne la liberté (ou plutôt : telle liberté, soigneusement délimitée), mais en échange je vous prends (par exemple : la sécurité ; ou bien : la prospérité). Marché de dupe : comment pourrait-on nous marchander ce qui nous appartient ?
Mais, pour finir, je choisirai une autre formule, empruntée à Maurice Béjart : « Notre société a oublié que la liberté ne se donne pas, on doit la conquérir, et le grand ennemi dans ce combat, c’est « nous-mêmes », notre paresse et notre suffisance. » (Ainsi danse Zarathoustra - p.95).
Au risque de faire « vieille baderne », je retiendrai cette leçon de morale, consistant à souligner ce qui semble désastreusement oublié aujourd’hui, c’est que notre principal combat doit être livré contre nous-mêmes. Mais attention aux mortifications stériles, aux obsessions d’anorexiques : ce combat doit être libérateur.
Allez en paix, mes bien chers frères.
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