L'amitié à moitié ne se peut exister car hors la première et bonne moitié se peut alors exister l'inamitié.
René Descartes
Descartes, c’est l’homme qui a besoin de trois mots pour dire ce qui demanderait aux autres hommes trois pages. Résultat : faut s’accrocher pour le suivre…
Remarquez, j’exagère peut-être. Ici, ce n’est pas si difficile, parce qu’il nous conduit à nous poser une question toute simple : quand je n’aime qu’à moitié, de quoi est faite l’autre moitié de mon sentiment ? Réponse : il peut être fait d’inamitié, ce qui suggère au moins que ce genre de sentiment hybride est condamné à s’autodétruire : « L'amitié à moitié ne se peut exister ».
Selon Freud, cette ambivalence des sentiments pourtant est la règle : le seul problème est néanmoins, comme le signalait Descartes, de faire que l’amitié et la haine ne se détruisent pas comme la matière et l’anti-matière. Il faut une cloison étanche, comme l’est la frontière entre deux pays : d’un coté les amis, de l’autre les ennemis (1).
Mais, Freud n’en reste pas là. Pour lui, l’ambivalence est la règle, ce qui veut dire que l’amitié ne peut exister que liée à la haine ; mais cela ne peut exister que dans l’inconscient, dont le mécanisme est caractérisé par le fait que la contradiction des sentiments ne produit pas leur autodestruction : je peux aimer infiniment et détester absolument le même être. L'amitié ne peut donc être qu’à moitié : ce qui veut dire que je refoule - dans mon inconscient - mon hostilité vis à vis de tous ceux que j’aime ; et de même, je refoule mon amour vis à vis de tous ceux que je hais.
Oui, même votre belle mère ; je sais que c’est dur à entendre. Mais c’est comme ça.
(1) Voir message du 24 janvier 2006
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