Friday, October 05, 2007

Citation du 6 octobre 2007

Leur vie : ils seront flics ou fonctionnaires
De quoi attendre sans s'en faire
Que l'heure de la retraite sonne

La montagne - Paroles et Musique: Jean Ferrat (1964)

Le texte de la chanson est ici. Si vous avez 3 minutes 13s pour regarder la vidéo : ici

En 1964, cette chanson a fait un petit scandale.

Scandale parce que Ferrat y affirme que les fonctionnaires ne font qu’une chose : attendre sans s'en faire / Que l'heure de la retraite sonne ?

Vous n’y êtes pas du tout. C’est que Ferrat se permet ensuite de dire que la vie moderne, c’est le formica, le ciné et le poulet aux hormones : ça ne s’appelait pas la « malbouffe » c’était bien plus grave, parce que la rumeur affirmait que ceux qui forçaient sur le poulet avaient des seins qui leur poussaient. Idem avec le veau d’ailleurs. Le lobby des éleveurs de poulets a vu rouge.

Donc personne ne songeait vraiment que la caricature des fonctionnaires était une insulte à la réalité. On imaginerait facilement qu’aujourd’hui ce couplet ferait scandale : on le prendrait pour une agression des libéraux contre la Fonction Publique. Quoi ? Ferrat, un penseur du libéralisme !!!

Double erreur.

Première erreur : En réalité, Ferrat se bornait à répercuter une opinion générale, et c’est justement parce que tout le monde pensait comme lui, que ça n’a pas fait scandale.

Deuxième erreur : aujourd’hui c’est exactement la même chose. Notre Président dit : « on va supprimer 1/3 des fonctionnaire, et ça va marcher aussi bien… voire même mieux, si en plus on réorganise les services. ».

Question : à quelle condition l’équation (moins de fonctionnaire = autant de service public) peut-elle être résolue ? C’est simple : il faut que (les fonctionnaires supprimés = zéro différence) c’est à dire que ce soient des inutiles (paresseux, incompétents, comme vous voudrez).

Et c’est exactement ce qu’on pense : « Tous ces fonctionnaires qu’on va supprimer, on ne va pas s’apercevoir de la différence ; parce que c’est des feignants qui ne fichaient rien. Et même ça doit pas être difficile de doit faire mieux. Parce que la parlotte à la machine à café, voilà leur occupation essentielle. »

Vous avez compris que je n’ai pas la prétention d’ouvrir ici le débat sur l’opportunité des mesures qui vont être prises. Je voudrais simplement pointer le fait que ces mesures passeront même si les fonctionnaires se mobilisent contre elles, simplement parce qu’elles sont populaires. Qui donc est prêt à descendre dans la rue simplement pour qu’il y ait plus de fonctionnaires ?

Tenez : organisez une manif de soutien aux fonctionnaires : combien aurez-vous de gens à défiler avec vous ? Maintenant organisez une manif pour protester contre les test de filiation ADN. Il y aura la foule des grands jours.

S’il y a braves gens qui sont persuadés que j’ai tort, tant mieux.

7 comments:

Anonymous said...

"Question : à quelle condition l’équation (moins de fonctionnaire = autant de service public) peut-elle être résolue ? C’est simple : il faut que (les fonctionnaires supprimés = zéro différence) c’est à dire que ce soient des inutiles (paresseux, incompétents, comme vous voudrez)."

C'est surrtout que bon nombre de postes de fonctionnaires doivent leurs existence à la frénésie des gouvernements précédents (toute couleures politique confondus) à faire baisser les taux de chômage. A une certaine aphasie ignorant totalement le seuil d'incompétence (principe de Peter). A une sclérose dans les méthodes et la rationnalité qui crée un gouffre béant entre le privé et le public et dont on ressent les inégalités lorsqu'arrive la paye.

Anonymous said...

La vraie question concernant la fonction publique, et donc le service public, c'est dans quelle mesure nous sommes prêts à dépenser de l'argent par solidarité.
Il est évident que les services publics coûtent très chers, et que selon des critères de pure rentabilité, ils ne sont pas du tout viables.
Prenons un exemple. En Haute-Marne, les pompiers ne disposent d'aucun hélicoptère. Quand l'intervention d'un hélicoptère est nécessaire (par exemple pour transférer un blessé grave vers un hopital) il faut donc faire appel à un hélicoptère de Dijon ou de Nancy. Cela rallonge bien évidemment le temps d'intervention, et peut empêcher de sauver des vies (comme c'est déjà arrivé). Mais un hélicoptère, cela coûte cher, de même que le pilote qui va avec (celui-ci serait d'ailleurs sans doute taxé de "fainénant" s'il n'avait à intervenir que ponctuellement...). On sauverait ainsi sans doute quelques vies par an, mais sommes-nous prêts à payer pour ces quelques vies sauvées ?

Jean-Pierre Hamel said...

- le seuil d'incompétence (principe de Peter).
Comme on le sait, le principe de Peter s’applique aussi bien dans les entreprises privées que dans le service public.
Par contre ce qui est en effet choquant, c’est l’impunité systématique dont jouit le fonctionnaire du fait de son inamovibilité. Mais reste à savoir si elle a souvent l’occasion de se manifester.

- Mais un hélicoptère, cela coûte cher, de même que le pilote qui va avec
Même chose pour la poste, même chose pour l’école, etc… La désertification des campagnes est une conséquence de la restriction du service public, et elle ne peut que s’accélérer.
Question sincère : je ne me rappelle plus si le ministère de l’aménagement du territoire existe encore. Parce que s’il existe, alors je me demande comment il va pouvoir remplir sa mission.

Djabx said...

Merci à tous pour vos lumières.
Sans vouloir non plus trop jeter de l'huile sur le feu, je poserai que quelques questions dont je n'aie pas forcement la réponse:

Pourquoi a-t-on plusieurs caisse d'assurance maladie? (redondance du personnel pour faire la même choses, et pour nous utilisateurs, plusieurs organisme auxquels s'adresser.)

Pourquoi un professeur agréger qui enseigne a des lycéen, collégien, qui ne fait pas de recherche, a-t-il moins d'heure que son collègue qui n'a "qu'un" capes?

Pourquoi une personne incompétente à son poste (ça arrive même dans le privé) ne peut pas être "remerciée"?

Pourquoi peut-on en arriver à des situations comme celle-ci:
le gardien (responsable aussi du ménage) de la salle des fêtes de chez mes parents qui faisait:
_son possible pour fermer la salle des fêtes les week-end car les "gens" faisaient globalement trop de bruit, et que ça l'empêchait de dormir.
_avait fait installé un portail à l'arrière de la salle des fêtes pour pouvoir garer sa voiture comme il le souhaitait (et empêchait l'accès aux coulisses).
_faisait appel à une société de ménage (au frais de la mairie) pour nettoyer la salle des fêtes
_que cette personne n'a pas pu être "remerciée" mais simplement mutée dans un autre service de la mairie (au bout de 8ans de procédure!!).

Si vous avez une réponse à ces questions je veux bien les entendre, car personnellement il y a quelque chose qui m'échappe un peu.

PS: je suis très loin de penser que les fonctionnaires sont inutiles et tous de gros branleur. Mais globalement il y a une trop mauvaise organisation des services de l'état qui les rendent pas assez efficaces.

PPS: le cas du pilote d'hélicoptèr est un vaste problème qui se pose aussi en montagne.

Anonymous said...

Je ne répondrai qu'à deux questions.
1. Sur le professeur agrégé.
A la base, l'agrégation avait pour fonction de former des professeurs de lycée et/ou d'enseignement supérieur. Cette distinction s'est perdue, mais les statuts n'ont pas été révisés. A mon sens, la différence entre le professeur certifié et le professeur agrégé n'a donc plus lieu d'être ; mais chaque fois que j'exprime cette opinion, il ne manque pas de gens, y compris de professeurs certifiés, pour défendre l'existence de l'agrégation (facteur de perspective de carrière et donc de motivation selon eux).
2. Sur la personne incompétente qui ne peut être "remerciée".
Cela s'appelle posséder des droits. Ces droits ont pour fonction de protéger les individus, notamment d'un licenciement abusif (et donc d'un abus de pouvoir de l'employeur). Fondamentalement juste dans son principe, cet état de droit entraîne comme c'est toujours le cas, des abus injustifiés.
La question qui peut alors être posée est la suivante : doit-on préférer l'existence de coupables non condamnés, ou d'innocents condamnés ?
Pour ma part, je choisis la première réponse.

Djabx said...

Cela s'appelle posséder des droits. Ces droits ont pour fonction de protéger les individus, notamment d'un licenciement abusif

Je comprends bien votre point de vue, et je suis bien évidement pour une protection des employés (étant employé moi même). La question n'est pas là. Le problème que je souhaitais soulever, est que dans la fonction publique il me semble impossible d'être viré pour "fautes grave" (ne pas faire le boulot pour lequel on est embauché par exemple). Et là, j'avoue que je ne comprends pas bien pourquoi.
A mon sens, les règles sont simples: tout travail mérite salaire mais ça implique aussi que pas de travail, pas de salaire. Après l'état français a fait le choix d'ajouter un système d'entraide entre tous, pour aider les plus "faibles" (malades, chômeurs etc...) et différentes lois pour protéger l'employé d'être simplement "utilisé" au bon vouloir des patrons. Je trouve cela très bien mais cela n'empêche que je ne comprends pas pourquoi quelqu'un qui ne fait pas son travail puisse rester à son poste.

Jean-Pierre Hamel said...

Je crois qu’on est arrivé au nœud du problème : tous les privilèges dont jouissent les fonctionnaires peuvent être admissibles s’ils sont justifiés (n’oublions pas que l’article 2 des Droits de l’homme de 1789 reconnaît la nécessité des distinctions sociales sous réserves d’être fondées sur « l’utilité commune » - le principe du maximin n’est pas loin !).
Seulement ces privilèges, justifiés lors de leur institution, le sont moins aujourd’hui. Il y a une désorganisation des administrations au cours du temps, une sorte d’entropie bureaucratique.
Exemple ?
- Les agrégés, comme le dit Pierre-Jean, devaient enseigner seulement en lycée (= second cycle) où ils étaient sensés avoir plus de travail que dans le 1er cycle (=correction de copies). Cette distinction, n’étant plus justifiée que par l’opiniâtreté des bénéficiaires (et de la Société des Agrégés), elle devrait être supprimée (certains diront : que tout le monde ait l’horaire des agrégés… of course !)
- La retraite à 55 ans des mineurs, de conducteurs de locomotives, etc… Oui mais les conditions de travail ont changé là aussi.
=> L’entropie bureaucratique consiste donc dans la sclérose du système.
- La point délicat est l’inamovibilité du fonctionnaire. Parce que là on peut dire que rien n’a changé : il faut que la fonction publique soit impartiale, et que pour cela elle soit indépendante du pouvoir, quelqu’il soit. Voyez ce qui se passe dans la territoriale : un système des dépouilles y règne plus ou moins, et on verra bien des changements dans le personnel des mairies et autres organismes municipaux ou départementaux après les élections.
Eviter ça, oui, c’est indispensable. Mais Alexandre a raison de dire que rien ne peut justifier que quelqu’un en profite pour ne pas faire son travail, ou le faire mal.
Il y a des effets pervers avec les quels on peut vivre ; il y a d’autres qui sont insupportable. Je me revois expliquant à de délégués parents pourquoi le prof de physique (ouf !) de leurs enfants resterait en poste jusqu’à ce que « l’heure de la retraite sonne »…