Milan Kundera –
L'insoutenable légèreté de l'être (1984)
Hitchcock – Vertigo
(1958)
Tiens ? Encore un escalier ! Et qui plus
est : encore un personnage entrain de descendre un escalier… (Voir Post
d’hier). Sauf qu’hier on était en bas de l’escalier, ici nous sommes en haut.
Hitchcock nous donne une vision vertigineuse de l’espace qui se creuse et
tourbillonne presque indéfiniment sous les pas du personnage – celui qui dans ce
film souffre de vertige.
L’escalier n’est plus (comme dans notre Post d’hier) le
prétexte d’un mouvement (donc la source d’un dynamisme), mais il est un moyen
de structurer un espace. D’ailleurs il est probable que nous n’aurions jamais
le vertige si nous-mêmes descendions l’escalier, mais seulement dans la vision en
perspective de la cascade de ses marches.
Bon – Maintenant le contenu de la citation de
Kundera : il reprend une idée bien connue selon laquelle le vertige n’est pas lié à la peur
du vide, mais au désir de s’y jeter.
- Sartre disait déjà que c’est notre liberté qui nous
donne le vertige. Oui, je suis libre de me jeter dans le vide, et le vertige
est un symptôme de ma liberté :
si donc j’étais tenu par une corde, je n’aurais plus la liberté de tomber, donc
plus de vertige, alors même que la perception du vide serait strictement la
même.
Mais les nuances existent : certes Kundera affirme
lui aussi que le désir de se jeter dans le vide n’est pas un état originel. Mais
pour lui il n’est pas la conséquence de ma liberté – il est celle d’un envoutement : le vide nous appelle,
il exerce sur nous un charme vénéneux au quel nous ne pouvons résister.
Mais, là aussi, Kundera ne fait que reprendre ce que nous
connaissions bien : voyez l’épisode du chant des Sirènes dans l’Odyssée.
Résumé :
Ulysse sait que le chant de ces enchanteresses va l’attirer irrésistiblement
sur les récifs où son bateau va se fracasser. Désireux de connaitre malgré tout
ce chant, il se fait attacher au pied de son mat, tandis qu’il bouche les
oreilles des marins avec de la cire. Ceux-ci ne peuvent donc entendre ni le
chant fatal, ni les ordres d’Ulysse qui les appelle à mettre le cap sur la
côte. Ajoutons que ces sirènes-là n’ont pas une queue de poisson mais des ailes
d’oiseau.
Image :
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