H. de Livry
Le procédé du chiasme est tellement utilisé qu’on finit par ne plus le remarquer. Dire : « je dis ce que je pense et je pense ce que je dis » finit donc paraître tautologique.
Pourtant, remarquons quand même que ce n’est pas tout à fait la même chose :
- Dans le 1er cas, deux étapes : d’abord je pense à ce que je vais dire ; et puis je le dis. Cette seconde étape est neutre, puisque je ne dois rien ajouter ni retrancher : l’expression doit être raccord avec la pensée ni plus ni moins.
- Dans le second cas, d’abord je parle, et puis j’assume. Si je suis une tête de linotte dont la langue agile caracole loin devant sa pensée, tant pis pour moi. Ce que j’ai dit, je n’ai plus qu’à le penser…
Si je ne suis pas un poète surréaliste qui pratique l’écriture automatique ni le rêve éveillé, je vais être mal.
Et ça serait ça la franchise ? Bizarre…
Bizarre, à moins de dire que justement parce que je m’engage à assumer mes paroles, je vais être particulièrement attentif à ne pas leur laisser dépasser ma pensée, à éviter d’ouvrir un espace de libre interprétation, d’ambiguïté, etc…
Voilà donc où nous en sommes : la franchise consiste à empêcher que ne se creuse un écart entre la pensée et la parole qui la dit ; que la duplicité soit un antonyme de la franchise suffit pour le faire comprendre
Oui, mais alors pourquoi notre auteur dit qu’il vaut mieux penser ce que l’on dit que dire ce que l’on pense ?
Parce que comme le dit Lacan (1), dire ce que l’on pense, tout ce que l’on pense, ça on n’y arrivera pas. Par contre penser ce que l’on dit, ça devrait être possible.
Il y a même des psychanalystes pour vous y aider…
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(1) En toute franchise je n’ai pas la référence, mais j’assume l’attribution.
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