Les politiques grecs, qui vivaient dans le gouvernement populaire, ne reconnaissaient pas d'autre force qui pût le soutenir que celle de la vertu. Ceux d'aujourd'hui ne nous parlent que de manufactures, de commerce, de finances, de richesses, et de luxe même.
Montesquieu - De l’esprit des lois (Principes des trois gouvernements – Chapitre 3), Principe de la démocratie
En démocratie selon Montesquieu, si la vertu ne guide pas les dirigeants, seul l’appât de la richesse et du luxe va les soutenir – ou plutôt les précipiter dans la corruption. Ne pourrait-on accoupler la vertu et la recherche de la richesse ? Le capitalisme associé au libéralisme nous oriente dans cette voie, et la recherche de l’enrichissement n’est plus aujourd’hui synonyme de vice incompatible avec une bonne politique ; par exemple, pour en revenir à nos grecs d’aujourd’hui, les mensonges de l’Etat auraient pu paraître supportables sous condition de réussite dans la gestion financière du pays.
Hélas pour eux, les politiques grecs d’aujourd’hui ne connaissent ni la vertu, ni la bonne gestion financière…
On ne demande plus aux gouvernants d’être vertueux (on a des ayatollah pour ça) (1) ; par contre on leur demande de respecter les promesses faites au peuple lors de leur élection – donc de proscrire le mensonge électoral. Autrement dit on a glissé de ce qui fait la force du pouvoir politique, vers les buts qu’on peut lui assigner. Il ne s’agit plus de légitimer le pouvoir en considérant ce sur quoi il s’appuie, mais seulement de considérer le contrat qui le lie aux électeurs. Notre-Président le répète depuis 2007 : j’ai été élu pour faire ceci-cela… et pas pour cela-ceci (2).
Dans certains pays africains (je pense au Gabon comme exemple), le président corrompu jusqu’à la moelle a acheté la paix civile avec des enveloppes gorgées de dollars. Lorsqu’un opposant prétendait fonder un parti d’opposition, il était convoqué à la présidence, et au lieu de le jeter aux crocodile on lui donnait une grosse enveloppe en échange de son ralliement.
Certains diront avec Montesquieu qu’effectivement en démocratie l’absence de vertu est signe de corruption. Soit. Mais alors que pour Montesquieu un tel régime devait inéluctablement dériver vers l’anarchie et la guerre civile, on constate que le vice est aussi un bon ciment social.
Voilà en effet qui ferait tomber à la renverse et Platon et Aristote.
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(1) …ni d’ailleurs d’être de bons gestionnaires (il y a des financiers pour ça), pas plus que de bons stratèges (il y a l’Etat major pour ça)
(2) « Pas pour augmenter les impôts, pas pour baisser les salaires, pas pour laisser les voyous terroriser les honnêtes gens… » Chic !
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