Thursday, March 06, 2014

Citation du 7 mars 2014


Rien n’est plus dangereux, en diplomatie, que de parler de la paix en amateur ! Chaque fois que le désir de paix a atteint une certaine intensité et n’a pu être contenu, on a eu la guerre !
Robert Musil L'homme sans qualités (1930-1932)
Nous avons subi une défaite totale et sans mélange (...). Notre peuple doit savoir que nous avons subi une défaite sans guerre, dont les conséquences nous accompagneront longtemps sur notre chemin
Winston Churchill – Le 5 octobre 1938, à propos des accords de Munich (Cité ici)
Les négociateurs de Munich ne pouvaient pas dire : On ne savait pas ! Le démembrement de la Tchécoslovaquie (la question des Sudètes) a été le dernier reniement avant la guerre qui se déclencha en septembre 1939.
Et aujourd’hui ? Selon certains, la partition de l’Ukraine basée sur le reniement de nos engagements internationaux n’est même pas une capitulation, mais une position de repli devant les appétits d’annexion de Wladimir Poutine. D’ailleurs tout le dispositif est déjà en place : les Américains et les Européens qui piétinent, chacun poussant l’autre sur le devant de la scène, les évaluations des faiblesses commerciales des Russes pour montrer que leur intérêt est de modérer leurs ambitions, etc. En 1939 on ne voulait pas mourir pour Dantzig. Aujourd’hui on ne veut sûrement pas mourir pour la Crimée.
Le parallélisme entre ces deux situations est frappant, et pourtant certains voudront le nier : comparaison n’est pas raison, diront-ils – et puis l’histoire ne se répète pas, chaque époque diffère radicalement des autres. On jugera donc que le diagnostic de Churchill, formulé à chaud au vu des engagements diplomatiques de 1938, est bien trop engagé dans son époque pour être généralisable. D’ailleurs, la Crimée n’est pas le territoire des Sudètes, Poutine n’est pas Hitler, l’Europe-Unie n’est pas le tandem Chamberlain-Daladier.
Oui – mais : et Musil ? Chaque fois que le désir de paix a atteint une certaine intensité et n’a pu être contenu, on a eu la guerre ! Ça, c’est publié en 1930 (et sans doute écrit bien avant) : c’est un principe général, quelque chose qui ressemble à une loi de l’univers !
Reste que le désir de paix est tributaire de la menace de guerre. Alors, c’est là que les diplomates ont leur mot à dire : qu’en est-il de cette menace aujourd’hui ?

2 comments:

Anonymous said...

Une guerre qu'on évite est seulement différée au bénéfice de l'adversaire.
# Nicolas MACHIAVEL # Écrivain, homme politique # "Le prince" # début XVIe (1513) # Italophone

Jean-Pierre Hamel said...

Bien vu ! Merci