Wednesday, July 06, 2016

Citation du 7 juillet 2016

La beauté du visage est un frêle ornement, / Une fleur passagère, un éclat d'un moment, / Et qui n'est attaché qu'à la simple épiderme.
Molière. Les Femmes Savantes, Acte III., Sc. VI.
Molière se fait l’écho d’une conception fort connue à son époque, popularisée par la Contre-réforme, celle des Vanités qui ravalent la beauté féminine à un trait superficiel et transitoire, origine du péché et qui doit être mortifié (ci dessous sainte Madeleine se flagellant le sein).

Elisabeth Sirani – Sainte Madeleine au désert
Alors, la beauté ne serait qu’une illusion machinée par le démon pour la perte des fidèles ?
N’y a-t-il pas une contradiction qui consisterait à dire : tout ce que l’on peut voir – y compris la beauté des femmes – est éphémère et donc périssable ; la beauté véritable est invisible, seul l’esprit peut la contempler – raison pour la quelle elle est impérissable 
Cela Platon l’avait détaillé et argumenté il y a bien longtemps (1). Pour lui, de même que tout ce qui est sensible – qu’on peut voir, toucher ou sentir – est sans valeur, de même tout ce qui est éternel est invisible insensible. La peau – nous y voilà – est très belle mais elle ne conserve pas ses qualités : la voici qui avec l’âge, s’épaissit, s’avachit et devient grisâtre. Pouah ! Comment pourrait-on aimer toucher et baiser une peau comme celle-là ! Nos élégantes la font retendre, mais cela ne sert à rien : elle est et elle demeure une vieille peau.
Disons, comme Platon, « tout ce que j’aime est invisible, parce que ça n’existe que dans mon esprit ». Ce que disait avec une force exemplaire Claude Simon dans ce passage :
« Cette interminable chevauchée nocturne n'avait eu d'autre raison, d'autre but que la découverte à la fin de cette chair diaphane modelée dans l'épaisseur de la nuit : non pas une femme, mais l'idée même, le symbole de toute femme. » Claude Simon – La route des Flandres – Citation du 11 mai 2015
Mesdames, laissez tomber toutes les onguents de l’Oréal qui vous coutent la peau des fesses pour entretenir celle de votre visage : rappelez  à votre amoureux que votre beauté, c’est dans son subconscient qu’il doit la chercher, pour l’aimer et la caresser. Et s’il vous rit au nez, mettez-le dehors et cherchez un amoureux philosophe.
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(1) Platon – Le banquet, discours de Diotime, 209e-212a

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