Laissez moi reposer jusqu'à ce que vienne le jour désiré
(Dimitte me paululum ut quiescam donec optata veniat dies)
Sur
une pierre tombale – Cathédrale saint Pierre de Troyes
Voilà
une mort qui ressemble à une hibernation… Quel sort désirable !
Oui,
dormir jusqu’à ce que vienne le printemps charmeur, ou bien le bel amoureux, ou
encore la résurrection des justes : n’est-ce pas cela que nous
souhaitons ?
Voilà
ce que doivent se dire bon nombre de ceux (1) qui reprennent le travail ce
matin et qui souhaiteraient peut-être pouvoir dormir jusqu’aux prochaines
vacances.
Quoique…
J’ai écrit « bon nombre d’entre nous »
- or, les retraités comme moi doivent s’exclure du nombre des candidats à
l’hibernation. Car notre vie ressemble plutôt à celle des heureux vacanciers
qui se demandent le matin à quoi ils vont passer leur journée, étant entendu
que nulle obligation ne leur incombe et que le champ des loisirs qui s’offre à
eux est indéfini.
Laissez
moi reposer jusqu'à ce que vienne le jour désiré…
Oui, car comment abolir le temps, sinon par le sommeil ? Supposons qu’on
n’ait pas d’occupation impérative, l’ennui nous gagne et le temps s’étire alors
indéfiniment, faisant espérer que le sommeil abolisse notre conscience
malheureuse.
Cette
conception de la vie offre une belle illustration de ce que serait
l’« épanouissement », à l’opposé de ce que Marx appelle
« aliénation » : car dit-il, l’homme aliéné par son travail est
dépossédé de lui-même : tantôt il travaille, tantôt il vit. Que ne peut-il
dormir comme un somnambule qui dormirait en même temps qu’il travaille ?
Éh
oui ! Nous voilà un peu comme l’insomniaque qui se réveille fatigué de sa
nuit si fragile et qui dit : « Vivement l’heure de la
sieste ! ». Ou bien comme ces gens pour qui le bonheur est d’être au
lit plongé dans un sommeil semi-hypnotique.
Maintenant,
n’oublions pas que cette citation s’applique à une morte en attente de la
résurrection du Jugement dernier. Ce sommeil serait donc surnaturel, un peu
comme la dormition de la vierge
Marie.
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(1)
Je pense aux enseignants dont c’est la pré-rentrée ce matin.
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