Thursday, August 03, 2017

Citation du 4 aout 2017

La mémoire fait partie de notre être : oublier, c'est mutiler son âme, c'est dessécher son cœur ; oublier c'est cesser d'être homme.
Henri-Frédéric Amiel – Journal intime, le 19 juin 1851.
J'ai une mémoire admirable : j'oublie tout, c'est d'un commode !
Jules Renard – Journal du 8 avril 1907.

Voici deux citations
- portant sur le même sujet : la mémoire ;
- toutes deux issues du même objet littéraire : les Mémoires ;
- et qui disent exactement le contraire l’une de l’autre : la mémoire bienfait pour l’un, malédiction de l’âme pour l’autre.

Que faut-il faire de tout cela ? Passer sur la contradiction en disant qu’il s’agit en réalité de deux points de vues complémentaires ? Ou au contraire dire que les citations vont toujours comme ça, deux par deux et en sens contraire (comme « Tel père, tel fils » et « A père avare, fils prodigue ») ?
On aurait donc deux stratégies différentes : dans le premier cas, fournir les contextes, susceptibles de prouver qu’on a affaire en réalité à deux éléments provenant d’une même morceau ? Et dans l’autre, donner pour chaque citation la citation opposée, prouvant que tous les avis existent et qu’ils sont tous aussi bons – ou aussi mauvais ?

Et si on se tournait vers les auteurs de ces citations ? Si on se demandait non pas quelle est leur stratégie, ni comment ils veulent solliciter notre opinion, mais bien plutôt s’ils ont un engagement philosophique différent et si leur vérité se révèle par ces bouts de phrases ?
Ainsi, Amiel qui est à la recherche d’un être d’une pièce qui ne peut rejeter son passé, car le passé n’est pas passé, qu’il fait qu’un avec le présent. Et Jules Renard qui a une conception de la vie ressemblant à celle d’un aérostier, qui pour s’élever jette pardessus bord le lest qui freine son mouvement ascendant.



Deux philosophies de la vie, l’une tournée vers un sens finalement approfondi, un peu existentialiste – on est du côté de Sartre. L’autre tourné vers l’inconscience et l’imagination, et on se retrouve chez Nietzsche.

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