Friday, March 23, 2012

Citation du 24 mars 2012

Animal-machine.

En vérité, c'est enfin la machine qui tend à devenir animal. Fonctionnellement, il y a un énorme progrès en ce sens. D'ailleurs, nous ne pouvons concevoir avec précision un vivant, que par les idées que nous avons des machines. Et nous remplissons la différence avec les mots. Ce remplissage est la métaphysique.

Paul Valéry – Cahiers, XXVI (1942)

Il semble que Valéry se contredise dans ce passage : car si c’est la machine qui tend à devenir animal, il ne peut se faire que le vivant se comprenne à partir du machinisme. Va-t-on de la machine au vivant ou du vivant à la machine ?

A moins que Valéry veuille dire qu’il faut distinguer entre la fonction et l’intellection. Qu’on comprenne le vivant à partir de la machine, et puis après, qu’on fasse fonctionner la machine et imitant le vivant.

Bien sûr, la biologie a fait plus de progrès depuis 1942 (date de rédaction de ce passage) que depuis son origine jusqu’à 1942. Là où l’analyse s’arrêtait à la cellule (et encore : peut-être n’en était-elle encore qu’aux tissus), nous en sommes aujourd’hui à la molécule. Il faut donc complétement dépasser cette alternative entre mécanisme et vitalisme qui parait aujourd’hui complétement stérile.

Par contre, sur le plan fonctionnel, Valéry avait vu juste : la machine tend de plus en plus à devenir animal, non en l’imitant, mais bien en accomplissant ses fonctions.

C’est le moment de souligner quelque chose qui me surprend toujours : alors que nous faisons des robots des esclaves mécaniques (comme dans les usines d’automobiles, mais aussi dans le domaine ménager avec l’aspirateur-robot Roomba), les japonais, eux, imaginent des robots affectifs, des machines qui imitent l’animal et qui ronronnent quand on les caresses, ou qui vous suivent à la cuisine en remuant la queue.

L’idée est qu’il faut, pour sortir les vieillards de la solitude, leur donner des machines qui leur donnent l’illusion d’avoir une compagnie sans les inconvénients de l’animal.

Oui, c’est peut-être comme ça que la machine qui tend à devenir animal : faire le chien qu’on n’aura pas besoin de sortir.

Et pourquoi pas le petit-fils qui va regarder la télé blotti contre vous, mais ne mettra pas de la confiture sur le canapé du salon ?


N.B. Allez, aujourd’hui, c’est week-end : un peu de divertissement robotisé ne vous fera pas de mal : vidéo ici.

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De retour à mon cher ordinateur, je reprends la main et je réponds à nouveau aux commentaires que vous voudrez bien me faire.

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