Je voudrais te faire voir cette belle fille nue chaussée,
gantée et coiffée de noir, soie, peau et velours, et, les yeux bandés, se
promenant sur une frise de marbre, conduite par un cochon à « queue d'or » à
travers un ciel bleu. Trois amours - les amours anciens - disparaissent en
pleurant…
Félicien Rops –
Lettre à H. Liesse, 1879
Félicien Rops :
La dame au cochon – Pornocrates.
On a beaucoup glosé sur cette œuvre de Félicien Rops, y
voyant tantôt une image de la luxure des femmes, soumises il est vrai à
l’influence de la cochonceté des hommes, et tantôt une allégorie de la Culture
entrée en décadence du fait des
mœurs dissolues de cette fin de 19ème siècle.
Ainsi des petits
amours « anciens » qui disparaissent en pleurant. Ainsi des figures
illustrant les arts (sculpture, musique, poésie) effondrés dans la frise de
marbre.
Que cette décadence ait été ressentie très fortement à la
fin du 19ème siècle, les nombreux essais sur la crise de la culture
européenne et le déclin de la civilisation en témoigne.
Par contre ce qui est plus original est de voir en la
débauche une source de cet effondrement. Et pourtant un siècle et demi plus
tard, ce verdict semble bien confirmé :
-
La disparition du livre et de la lecture ? C’est la diffusion de vidéos
cochonnes sur Internet qui ruine l’édition de la pornographie-papier.
-
La musique classique remplacée par le hard rock ? C’est un effet de
l’onanisme qui rend sourd.
-
Les amours qui perdent leurs ailes ? Allusion au mythe du Phèdre dans
lequel Platon dénonce la chute de l’âme dans le corps.
-
Le cochon qui marche fièrement en tête ? Dénonciation des politiques qui s’égarent
dans des fêtes bunga-bunga. D’ailleurs on a les noms !
-
Et le fait que le cochon ait une queue d’or ? C’est le symbole du trading
bancaire…
La dame au cochon est donc bien une anticipation géniale
de ce qu’est ce début de 21ème siècle.
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