Il est relativement rare, de nos jours, d'être témoin de
passions vraiment grandioses. Elles sont le privilège de ceux qui n'ont rien à
faire. C'est la seule raison d'être des classes oisives d'un pays.
Oscar
Wilde – Aphorismes
Devrait-on – comme certains révolutionnaires ont prétendu le
faire – supprimer les oisifs, considérés comme des parasites sociaux, ou bien
devons-nous reconnaitre avec Oscar Wilde qu’ils ont une fonction sociale, une
utilité qui ne se mesure pas à l’aide des biens de consommation, que d’ailleurs
ils ne produisent pas ?
… Et s’ils étaient là pour donner le spectacle d’hommes et
de femmes vivants les passions les plus violentes qu’aucun d’entre nous, gens
« normaux » n’avons le loisir de vivre ? Ne font-ils pas ce que
la Tragédie antique faisait : montrer les plus extrêmes passions dans de tels
dérèglement que seuls des héros ou des demi-Dieux pourraient les vivre ?
Bof ! De nos jours, plus d’Œdipe, plus de Médée,
même plus d’Hamlet. Nous n’avons plus que des stars de la Jet-set :
… Celles-ci, après avoir retenu l’attention en exhibant
leurs gros seins, en profitent pour nous montrer leurs amours, leurs
désespoirs, leur ivrognerie etc. Faire la fête jusqu’à l’épuisement et
recommencer le lendemain ; s’alcooliser à tomber dans les bras du policier
appelé par le voisinage exaspéré du tapage ; enchainer les cures de
désintoxication à toutes sortes de substances… Bref : s’exhiber en proie
aux pires dérèglements.
Ce spectacle se vend fort bien : les magazines people
en tirent comme on le sait de gros profits. Ils se vantent à juste titre de
répondre à l’attente de leur public : comment analyser cette demande ?
C’est là que nous retrouvons Oscar Wilde : nous avons besoin d’aller au
bout de la passion ; ces élans dont nous sentons en nous la pulsation, sachons
où ils mènent, afin de nous en purger. Car nous sommes bien dans le sillage
d’Aristote qui estimait que la tragédie
nous « purgeait » de nos passions en nous permettant de les
vivre par procuration.
Quand « nous » lisons Voici ou Gala, nous ne
sommes pas simplement des voyeurs qui espèrent mater le cul de la princesse.
Nous n’essayons même pas de nous glisser dans sa peau. Ce que nous cherchons,
c’est aller au bout de la volupté et du malheur d’être riche.
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