Tuesday, December 08, 2015

Citation du 9 décembre 2015

La tâche à laquelle nous devons nous atteler, ce n’est pas de parvenir à la sécurité, c’est d’arriver à tolérer l’insécurité.
Erich Fromm
Traumatisés par les attentats de Paris, nous cherchons à nous rassurer et à trouver refuge dans les promesses du gouvernement qui nous annonce des mesures coercitives supposées transformer le pays en caserne où le moindre mouvement suspect serait repéré et « neutralisé ». Supposons que ce soit possible : serions-nous prêts à vivre dans un tel pays ? Il ne suffit pas de répondre Non ! avec indignation. Il faut aussi savoir si nous irons ensuite écouter tranquillement un concert de metal ou boire une bière à la terrasse d’un café sans vérifier avec crainte s’il n’y a pas des barbus qui trainent dans le coin avec la kalach’ en bandoulière.
Mais, évidemment, il est impossible de garantir la totale sécurité quand en face il y a des hommes déterminés à mourir les armes à la main, parce pour eux une mort glorieuse vaut mille fois plus que leur pauvre vie. Alors, que faire ? Apprendre à tolérer l’insécurité. C’est tout.

- Oui, mais comment y parvenir ? L’instinct de conservation est l’un des tout premiers et il domine la plupart de nos comportements. Faut-il pour dominer notre peur faire des exercices de détachement dignes d’un bouddhiste ?
Réfléchissons un peu : quand nous prenons le volant de notre voiture et que nous nous lançons sur les routes en lacets de la montagne, pensons-nous à ce qui pourrait nous arriver si un pneu explosait dans un virage ? Ou si notre régulateur de vitesse devenait incontrôlable à l’approche de la barrière de péage ? Encore plus simple : quand nous allons attaquer notre tartine de foie gras arrosée de sauternes, imaginons-nous le travail épuisant que nous imposons à notre estomac, notre foie, pancréas – que sais-je encore ? Non, bien sûr : le plaisir est trop grand et la menace trop imprécise pour nous impressionner. Et pourtant…

Donc : apprenons à considérer l’insécurité comme solidaire de la vie – je dirais même : solidaire de la bonne vie.

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