Bertolt Brecht
Traiter un adversaire de trou du cul sans fesses, c'est
l'anéantir, en faire un néant de sottise, un zéro.
Jean-Paul Sartre – Les
Carnets de la drôle de guerre (Cité le 2/2/2010)
On se reportera à notre post du 2 février 2010 pour une
philosophie (ou plutôt une ontologie) du trou. Notons simplement que cette
réflexion qui revient fréquemment indique combien nous sommes obsédés par ce
paradoxe d’un trou qui n’aurait pas de bord. Et d’abord, quelle représentation
nous en faisons-nous ? Eh bien justement aucune, et c’est là ce qui
irrite : on peut concevoir le trou non délimité, si on veut dire qu'on ajoute un déterminant à un substantif; mais on ne peut pas le voir, ni même l’imaginer.
Car ce qui nous retient sur ce bord (!) c’est bien cette
caractéristique de la pensée qui est de ne pouvoir fonctionner qu’avec un
contenu. Là où rien n’existe, là aussi est l’impensable.
« Aussi est-il
tout aussi nécessaire de rendre sensibles les concepts (c’est-à-dire d’y
joindre un objet donné dans l’intuition), que de rendre intelligibles les
intuitions (c’est-à-dire de les ramener à des concepts). » écrit
Kant dans la Critique de la Raison pure (lire ici).
- Soit donc un énoncé : le trou sans bord. Il nous faut pour le penser un concept : un
trou = le néant (ou le rien, mais
c’est moins métaphysique). Bon – maintenant, une intuition sensible (par
exemple quelque chose qu’on voit ou qu’on peut toucher). Et là, on n’a, avec le
trou sans bord, aucune image possible.
A quoi ressemblerait donc un trou sans bord ? à rien, car si vous le
représentez, il sera forcément délimité … par un bord. D’ailleurs imaginez
l’univers infini : vous ne pensez rien quant à l’espace qu’il occupe.
Maintenant concevez-le délimité : automatiquement vous allez imaginer un
autre espace de l’autre côté de la limite.
- Reste donc à penser le
trou noir, qui se définit non par le vide, mais par le plein. Même si
toutes les lois de l’univers sont abolies dans le trou noir, même si on ne
pourra jamais l’observer, on peut du moins dire qu’il a une forme : la
sphère (lire ici). On peut aussi imaginer les étoiles basculant dans cette
fournaise, image moderne de l’enfer…
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