Sunday, May 14, 2017

Citation du 15 mai 2017

Avec l’automation, qui est à la fois le secteur le plus avancé de l’industrie moderne, et le modèle où se résume parfaitement sa pratique, il faut que le monde de la marchandise surmonte cette contradiction : l’instrumentation technique qui supprime objectivement le travail doit en même temps conserver le travail comme marchandise, et seul lieu de naissance de la marchandise.
Debord – La société du spectacle (1967), 2 – § 45
Nous sommes en 1967 : les ordinateurs personnels n’existent pas encore, les robots sont des machines de laboratoire ou de fiction ; on ne possède pour en parler que le terme d’« automation », qui définit une théorie étudiant les conditions permettant « l'exécution totale ou partielle de tâches techniques par des machines fonctionnant sans intervention humaine. » (Dictionnaire)
Reste un problème, encore théorique en 1967 mais dont on devine déjà qu’il sera pressant dans un proche avenir : on vend des marchandises pour réaliser un profit ; or la production par des machines ne permet pas de faire de profit, puisque seul le travail humain produit une plus-value (Comme dit Guy Debord, la force de travail est la seule marchandise qui soit le « lieu de naissance de la marchandise »).

Cette thèse était pour les marxistes la preuve que le capitalisme succomberait un jour à ses propres contradictions. Debord, plus circonspect la définit comme une contradiction à surmonter (sans doute au sens hégélien de dépassement dans une synthèse (1)).
Bien sûr la thèse de Marx suppose qu’on admette que les machines ne produisent pas de plus-value, ce qui, étant donné les conditions actuelles du marché, et loin de se vérifier. Mais il y a quand même une urgence à reprendre la question posée par Guy Debord : c’est celle de la quantité – et surtout de la qualité – de travail dévolu aux machines. Il y a trop de bras devenus inutiles du fait de la mécanisation, et ces inemployés ont trop de bouches à nourrir. Si les machines continuent à se multiplier – et donc si contre la théorie elles continuent de produire du profit – alors on ne pourra jamais en freiner l’expansion, et il faudra bien un jour nourrir des gens inemployés non parce que l’économie est mal gérée mais au contraire parce qu’elle est gérée rationnellement.
Que faut-il faire devant ce chômage structurel ? Compter sur le progrès qui a jusqu’à maintenant toujours produit des tâches nouvelles qui échappaient aux machines ?
Ou s’orienter vers le malthusianisme, c’est-à-dire limiter le nombre d’homme à nourrir, sachant que la production des machines ne serait pas affectée par cette diminution de la population ?
Ou encore considérer que les biens produits ne sont plus à vendre mais à distribuer – ce qu’on anticiperait par le revenu universel ?
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(1) Sur l’aufhebung hégélien voir ici

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