Paul Valéry
L'inconnu est
l'espoir de l'espoir.
Belle formule n’est-ce pas ? Qu’on pourrait
développer : L’inconnu rend possible l’espoir qu’il y ait de l’espoir.
Un peu comme le malade à qui le médecin vient d’annoncer
qu’il a une tumeur, et qui se retient de demander : « Est-elle
maligne ? Si oui, peut-on la guérir ? Sinon, combien de mois
(d’années) me reste-t-il à vivre ? » - Et si son patient ne lui demande rien, le médecin ne dira
rien car il sait qu’il y a un pacte tacite qui le lie à lui : celui de lui
donner de l’espoir tant qu’il le peut ; et de ne pas l’empêcher d’espérer
quand il ne peut rien de plus.
Mais la merveille n’est pas là ; elle est dans ce
ressort intime du psychisme qui nous fait oublier ce qu’on ne veut pas savoir.
Voyez cet homme qui a fait un test de dépistage du sida sur la demande exprès
de ses proches. Voilà que le résultat arrive ; mais l’enveloppe reste
intacte sur le bureau, il ne va pas l’ouvrir parce qu’il a peur de savoir.
C’est un peu comme la mauvaise foi chez Sartre : le
refus de savoir ce qui nous blesse réside d’abord dans le fait de détourner le
regard, comme cet exemple, dans l’Etre et
le néant, de la femme courtisée par un amant très empressé et qui se met à
parler des beautés de l’art, pendant qu’elle abandonne sa main entre celles de
l’homme.
- Reste à savoir si la volonté d’ignorer est première et
si elle est suffisante lorsqu’on veut cultiver « l’espoir de
l’espoir ». Ne faut-il pas aussi un désir enraciné dans notre cœur et qui
dit : « Je sais bien… Mais
quand même »
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