Quand la
musique pleure, c’est l’humanité, c’est la nature entière qui pleure avec elle.
À vrai dire, elle n’introduit pas ces sentiments en nous ; elle nous introduit
plutôt en eux, comme des passants qu’on pousserait dans une danse.
Bergson, Les deux sources, ch. I (Texte à
lire en annexe)
Un philosophe,
c’est quelqu’un qui, alors que tout le monde passe sans s’arrêter, va marquer
une pose parce qu’il s’étonne et s’interroge (1). Ainsi des cérémonies en
hommage à Johnny Hallyday : comment comprendre leur importance ?
Pourquoi répéter – sans trop savoir ce que ça veut dire – « On a tous en
nous quelque chose de Johnny » ? Allons nous nous extasier devant son
extraordinaire longévité qui fédère trois générations ? Ou bien sur son
sens de la vie en communauté avec ces 700 bikers qui vont l’escorter sur les
Champs-Elysées ?
Mais de toute
façon, tout cela ne serait pas concevable s’il n’y avait pas, d’abord la
musique.
Car, Johnny
Hallyday est musicien, chanteur plutôt que guitariste, certes, mais soudé à son
groupe, ne faisant qu’un avec la musique et emmenant le public par la force de
ses rythmes et de ses timbres. Pour comprendre l’intensité de l’émotion qui
entoure la disparition de Johnny Hallyday il faut sans doute déplacer le point
de vue, délaisser ces sentiments et ces émotions qui entourent sa mort et se
tourner vers ce qu’il a suscité de son vivant : l’émotion musicale.
Le texte
proposé de Bergson relève la communion suscitée par la musique : même les
curés et les capitaines le savent : pour souder une communauté de fidèles,
comme pour mener la troupe au combat, rien
ne vaut la musique. Et comme ceux-là, les fans de Johnny Hallyday éprouvaient aussi
la force de cette communion quand ils reprenaient en chœur les airs de leur
idole.
Oui, c’est
ça, mais pas seulement. Bergson ajoute que les sentiments exprimés par la
musique ne sont pas simplement la somme des émotions des auditeurs. Ces
sentiments sont plus grands que ceux éprouvés par les individus, car ce sont
ceux de l’humanité : « Quand la
musique pleure, c’est l’humanité, c’est la nature entière qui pleure avec elle ».
La musique, en nous introduisant dans ces sentiments nous fait grandir par eux.
Raison pour honorer ceux qui nous ont fait partager cela.
Certains
hausseront les épaules : « Si les philosophes croient que Johnny
Hallyday nous fait communier avec l’Humanité, alors c’est qu’ils en ont une
piètre idée ! ». Mais, non. Voilà ce que notre époque a
découvert : il y a de l’humanité aussi dans les émotions éprouvées durant
les concert rocks.
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(1) Lire ici
le texte de Bertrand Russell
Annexe. – « Il
nous semble, pendant que nous écoutons, que nous ne pourrions pas vouloir autre
chose que ce que la musique nous suggère, et que c’est bien ainsi que nous
agirions naturellement, nécessairement, si nous ne nous reposions d’agir en
écoutant. Que la musique exprime la joie, la tristesse, la pitié, la sympathie,
nous sommes à chaque instant ce qu’elle exprime. Non seulement nous, mais
beaucoup d’autres, mais tous les autres aussi. Quand la musique pleure, c’est
l’humanité, c’est la nature entière qui pleure avec elle. À vrai dire, elle
n’introduit pas ces sentiments en nous ; elle nous introduit plutôt en eux,
comme des passants qu’on pousserait dans une danse. Ainsi procèdent les
initiateurs en morale. La vie a pour eux des résonances de sentiment
insoupçonnées, comme en pourrait donner une symphonie nouvelle ; ils nous font
entrer avec eux dans cette musique, pour que nous la traduisions en mouvement. »
Bergson, Les deux sources, ch. I
1 comment:
Quand la musique pleure, c’est l’humanité, c’est la nature entière qui pleure avec elle ». La musique, en nous introduisant dans ces sentiments nous fait grandir par eux. Raison pour honorer ceux qui nous ont fait partager cela.
Certains hausseront les épaules : « Si les philosophes croient que Johnny Hallyday nous fait communier avec l’Humanité, alors c’est qu’ils en ont une piètre idée ! ». Mais, non. Voilà ce que notre époque a découvert : il y a de l’humanité aussi dans les émotions éprouvées durant les concert rocks.
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(1) Lire ici le texte de Bertrand R
très cher jean pierre merci de la force de ce billet.
je suis à paris le défilé vient de se passer je viens de prendre dans mes bras des gens en larme et ne comprenant pas pourquoi johnny la fait trop pleurer et d'autres evenements de cette combrure oui c'est vraiment très juste et en plus vous avez une phto d'un de ses guitariste que j'adore
gros baisers de johnny qui est en vous en nous et à l'humanité.. et très bien bergson
je vous rembrasse
françoise
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