Tuesday, August 29, 2006

Citation du 30 août 2006

… quiconque refusera d’obéir à la volonté générale y sera contraint par tout le corps [politique] : ce qui ne signifie autre chose sinon qu’on le forcera d’être libre.

Rousseau - Du contrat social livre I, chapitre 7

Voilà une phrase qui a fait couler beaucoup d’encre. Comment peut-on forcer quelqu’un à être libre ? Ne s’agit-il pas d’un paradoxe absolu, Rousseau ne se moque-t-il pas de ses lecteurs ? Et si ce n’est pas le cas, ne doit-on pas trouver ici la preuve de son amour de l’Absolutisme d’Etat, dont Robespierre devait se souvenir, obligeant ainsi beaucoup de citoyens à être libres…pendant la Terreur ?

Je laisserai de côté l’analyse de la rationalité de la liberté, qui suppose que les fins étant communes à tous, l’action de chacun doit être soumise à des lois universelles. Il me semble plus intéressant de souligner la singulière conception de la liberté que propose Rousseau : pour lui la liberté n’est qu’un moyen, au service de la loi de nature qui nous impose de préserver notre existence. La liberté se définit alors comme l’autonomie, c’est à dire la capacité de chacun à décider pour lui-même de ce qui lui convient en vue de sa survie. Je suis libre lorsque je fais mon propre bien, dit-il dans l’Emile ; je ne suis pas libre de faire mon propre mal. Si je décide de faire mon propre malheur, ce n’est pas un acte de ma liberté, parce que cela va contre ma nature.

Dès lors on peut donc sans difficulté forcer quelqu’un à être libre : il suffit pour cela de connaître son intérêt mieux que lui-même. Selon Rousseau, ceci ne peut arriver que dans deux cas bien précis : dans l’enfance (autorité légale du père) ; et lorsqu’on est soumis à la passion qui nous empêche de faire ce qui est bon pour nous. On dira alors que la volonté particulière l’emporte sur la volonté générale.

Un exemple : je peux estimer de mon intérêt (donc = conforme à un choix de ma liberté) que mes enfants aillent à l’école ; et pourtant je peux désirer frauder le fisc pour ne pas payer l’impôt qui financera leur instituteur. Et c’est là que le persécuteur percepteur m’obligera à être libre.

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