Sunday, February 10, 2013

Citation du 11 février 2013



L'employeur met son argent dans les affaires et l'ouvrier y met sa vie. Le second a tout autant le droit que le premier de diriger ces affaires.
Clarence Darrow (1857 – 1938) – The railroad trainman
Commentaire II
Il n’y a plus de révolutionnaires ni d’utopistes pour exiger que les travailleurs prennent la direction de leur entreprise. Plus de communistes collectivistes, plus d’autogestionnaires, plus d’anarchistes communautaires.
En revanche on trouve des collectifs d’ouvriers qui demandent à jeter un coup d’œil sur les comptes de l’entreprise juste avant d’être jetés à la rue, pour vérifier que le plan social soit équitable. Eux au moins ils  ne risquent pas de jeter à bas l’ordre capitaliste.
Pourquoi cette passivité ? Je tente une réponse qui ne va pas non plus ébranler les murs des palais : parce qu’on n’a plus de doctrine de la légitimité de la propriété.
La question est : « Qu’est-ce qui fonde le droit de diriger une entreprise ? ».
- La compétence ? Oui, bien sûr, mais la compétence ne donne pas des droits sur l’entreprise, c’est simplement un moyen de gestion, et elle est au service du propriétaire ou des actionnaires, seuls légitimes pour dire ce qu’on doit faire – et qui peut le faire.
- Disons donc que, comme n’importe quoi, l’entreprise appartient à celui qui l’a payée, et que du coup le propriétaire légitime de l’usine est bien en droit de la « gérer » comme il veut, y compris de la mettre à la casse – et donc de liquider les ouvriers qui y travaillent.
Or, voici Clarence Darrow (1) qui nous explique que l’existence l’entreprise dépend aussi d’un autre investissement que celui de l’argent des actionnaires : c’est celui de la vie que les ouvriers mettent dedans en y travaillant, ce qui résulte de l’identification de la vie et du travail, tel que nous l’avons rappelé hier à la suite de Marx.
Observons donc, avec Clarence Darrow, que l’argent n’est pas tout, ne peut pas tout, et que le travail humain est et reste la source de la richesse de l’entreprise.
Si on en doutait, on pourrait poser cette question aux actionnaires : d’où viennent vos profits ?
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(1) Avocat américain qui a sans doute été considéré par ses compatriotes comme un dangereux socialiste. Voir ici.

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