C'est nous inspirer presque un désir de pécher, / Que
montrer tant de soins de nous en empêcher; / Et si par un mari je me voyais
contrainte, / J'aurais fort grande pente à confirmer sa crainte.
Molière – L'Ecole des Maris, I, 2 (vers. 155-160)
Lisette, qui
prononce cette tirade serait-elle un précurseur du féminisme ? Molière ajoute
par la réplique suivante (celle d’Ariste)
que pour maintenir les femmes dans la vertu, les verrous et les grilles ne
sauraient remplacer le sentiment de l’honneur. On retrouve le débat sur la morale
et la répression des fautes : la punition ne sert à rien tant que la
compréhension du caractère vicieux de la faute n’est pas reconnu. Punissez un
enfant, dit-on, et vous lui apprendrez à mieux se dissimuler la prochaine fois…
Mais le propos est ici légèrement différent : il
s’agit de souligner que le fait de dire,
principalement pour défendre, revient quand même à décrire le vice contre lequel il s’agit de prémunir, et donc de
donner à penser ce qui autrement resterait dans les brumes d’une naïve
ignorance. Les manuels de confesseurs (1) chargés d’enseigner aux prêtres l’art
de susciter les confidences de jeunes soumis à la tentation de la débauche
l’indiquaient bien fortement : inutile de donner les détails des perversions
dont on souhaite l’aveu – au cas où le jeune pénitent n’en aurait pas été
informé : la discrétion est la condition nécessaire pour obtenir une bonne
confession.
Faut-il dire que cette rouerie de confesseur n’est en fait
qu’une naïveté un peu ridicule ? Pas si sûr : parlant récemment d’une
campagne de prévention du suicide, un responsable d’association disait combien
ce genre d’intervention rencontrait d’obstacle en milieu scolaire.
« Attention, lui disait-on, ne soyez pas trop explicite. Vous risquez un
effet de contagion. Nos jeunes sont si fragiles… »
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(1) Un exemple entièrement numérisé datant de 1843, ici.
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