Le concept de chien n’aboie pas.
Attribué à Spinoza
(Pour un débat éclairant sur la question de cette attribution, voir ici)
Quand je dis « le chien aboie », c’est le chien dans la
pensée qui aboie, ce chien assimilé à qui j’impartis mon énergie de sujet ;
je répète en court l’action, j’en deviens moi-même l’auteur, l’acteur.
Claudel – Op.
Posthume
Le chien animal-aboyant aboie-t-il ? Question
saugrenue, comme de demander « quelle est la couleur du cheval blanc
etc... » ?
Pas tant que ça, si l’on admet qu’« animal-aboyant » est en réalité une
définition de dictionnaire. Selon Spinoza si cet « animal » n’aboie
pas c’est qu’il s’agit en réalité d’un concept.
Pour transformer des choses réelles en concept, il faut
faire une abstraction de leur originalité, de leurs particularités physiques,
de ces « grains » de matière sans laquelle elles ne seraient pas. On
opère ainsi la réduction à l’indenté d’objets divers moyennant l’élimination de
tout ce qui distingue telle occurrence de telle autre. A tel chien – Médor –
tel aboiement, qui sera unique et qui disparaitra avec lui ; et à tel
autre – Mirza – tel aboiement également unique, etc… : c’est cela qui est
éliminé dans le concept de chien
animal-aboyant.
--> En sorte que le chien en général ne peut aboyer, à
moins que l’aboiement en général existe lui aussi. Et pourquoi le concept
d’aboiement n’existerait pas ? Quelque chose qui me permettrait de classer
les différents cris d’animaux, et de distinguer le ouah-ouah du chien du miaou
du chat ?
Admettons. Mais alors comment cela va-t-il fonctionner,
si l’on suppose qu’il y a une cloison étanche qui sépare l’intellect conceptuel
et l’imagination des qualités sensibles ?
Peut-être s’agit-il d’un mécanisme en trois étapes :
entre le chien qui aboie derrière le portail et le concept (ce chien, comme tous les chiens aboie),
il y aurait le souvenir qui en revient dans ma mémoire et que j’entends en
imagination.
- Et en effet, selon Paul Claudel, s’il est vrai de dire
que le chien dans la pensée aboie, c’est que je l’imagine. Il s’agit
d’un aboiement produit en moi par ma pensée, un peu comme je produis le bleu du
ciel quand j’imagine l’été. Quand je pense que le chien aboie, j’opère une
véritable action : c’est comme si j’aboyais moi-même. Comme le dit Claudel, cet aboiement peut bien avoir lieu dans mon esprit,
silencieusement, il n’existe pas moins réellement
par l’intermédiaire de l’énergie que j’injecte dedans.
Et donc, cette énergie se mobilise plus facilement quand
elle est stimulée par l’imagination que par la conceptualisation. Par exemple,
regardez ceci :
A voir ça, moi, j’entends déjà les gueulements rauques de
cet effrayant animal. J’arrive même à sentir son haleine fétide : c’est
dire à quel point je mobilise mon « énergie
de sujet » – pour fuir à toutes jambes !
1 comment:
je vois que l'on fait pareil l'un l'autre pour nous lire.
bon je vais trouver votre point du jour je vous embrasse cher jean pierre
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