« L'insurrection, pensaient ces sages législateurs, n'est point un état moral ; elle doit être pourtant l'état permanent d'une république » (Voir un extrait du texte en annexe – Lire l’ensemble ici)
Sade – Français, encore un effort si vous voulez être républicains
(Adresse aux Français – La
philosophie dans le boudoir, 5ème dialogue) 1795 (En ligne ici)
Eloge de
l’immoralité.-
La thèse de Sade devance celle qui sera à l’œuvre dans la Fable des abeilles (1722) de
Mandeville – et qui avait tant scandalisé à son époque : la prospérité et
la sécurité d’un Etat suppose l’immoralité des citoyens. (Voir ici)
Son argument (voir Annexe) est limpide : un
gouvernement propice à la liberté est « un gouvernement dont le seul
devoir consiste à conserver, par tel moyen que ce puisse être, la forme
essentielle à son maintien » Point de lois, sinon pour assurer son maintien.
Maintenant, observons la réalité politique : un tel gouvernement est
environné d’autres gouvernements acharnés à sa perte et de peuples prêts
envahir le pays. Si l’on gouverne par des moyens moraux, alors la douceur des
mœurs et la vie paisible qui est assurée au peuple en fait une proie sans
défense. Il est donc nécessaire que la
dissolution morale, excitant la violence de chacun et cultivant donc un ferment
d’insurrection les mette en état de défendre leur territoire et donc leur
Gouvernement.
On dira peut-être que l’insurrection populaire se tourne généralement
contre les gouvernants et les renverse, semant le désordre là où régnait
l’ordre. On dira aussi avec Platon (1) que la débauche désagrège le tissu
social et éparpille les hommes, les conduisant à se combattre les uns les autres.
Sade réfute ces idées : les pays libres ont suffisamment d’ennemis pour
être en permanence mobilisés contre eux, faisant de leur violence et de leur
immoralité non un ferment de dissolution, mais une force cimentant leur horde
en armée dont la fougue l’emportera sur la voracité de leurs voisins. Au lieu
de pleurer sur les ruines de leurs chaumières, ils se battront pour défendre leurs
bordels.
Refusera-t-on de stimuler la débauche populaire ? Alors, ayons au
moins un chef dont la qualité sera justement l’immoralité. –
… Qui donc a dit :
« Selon un proverbe arabe, une armée de lions
commandée par un mouton sera toujours vaincue par une armée de moutons dirigé
par un lion. » ?
Réponse ici.
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Annexe (Ensemble du texte)
« Les législateurs de la Grèce avaient parfaitement
senti l'importante nécessité de gangrener les membres [de la Cité] pour que,
leur dissolution morale influant sur celle utile à la machine, il en
résultât l'insurrection toujours indispensable dans un gouvernement qui,
parfaitement heureux comme le gouvernement républicain, doit nécessairement
exciter la haine et la jalousie de tout ce qui l'entoure. L'insurrection,
pensaient ces sages législateurs, n'est point un état moral ; elle
doit être pourtant l'état permanent d'une république. » Sade – op cité, 5ème
Dialogue
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(1) Voir la description des effets de la débauche dans la République, livreIX
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