Au mythe de
la femme enfermée et séparée (dont l'obligation de chasteté impliquait la
chasteté de l'homme) s'est substitué le mythe de la femme ouverte et proche,
toujours à disposition.
Pier Paolo Pasolini (Voir texte complet
en annexe – Il s’agit de la suite du commentaire entamé hier de ce texte)
Commentaire I
La femme ouverte et proche est toujours à
disposition :
entendez à disposition de l’homme qui peut en jouir comme bon lui semble. Nous
voilà plongé en plein mythe de la femme qui n’est honnête qu’enfermée dans le
gynécée, et qui ne peut sortir dans la
rue que surveillée par un homme et surtout voilée – sans quoi elle est une
putain. Enfin, quand on dit « mythe », on devrait plutôt entendre « tradition »,
« culture », et même société qui autorise les hommes à enfermer les
femmes comme on vient de le dire. La femme libre est forcément une prostituée.
Je voudrais
aujourd’hui non pas souffler sur les braises de l’islamophobie (« Regardez !
Voilà comment les musulmans traitent les femmes ! Pour eux les droits de
l’homme excluent ceux des femmes ! » Etc…). Non – mais rappelons-nous
que ces propos de Pasolini ne viennent pas de nulle part ; qu’ils ont fait
florès au 19ème siècle, et encore dans la haute bourgeoisie au 20ème.
Oui, c’est chez nous et non dans je ne sais quelle société exotique qu’une honnête
femme ne devait pas être seule dans la rue, ni bien sûr dans la vie. Soumise à
l’autorité d’un père, d’un mari, d’un directeur de conscience (ou à la rigueur
d’une duègne,) elle était considérée comme une mineure qui ne pouvait diriger
sa vie comme bon lui semblait, ni travailler sans l’assentiment de son époux.
Les femmes ont eu le droit de vote en 1944 – tout le monde le sait ; mais
on a peut-être oublié qu’elles n’ont eu droit à posséder un compte en banque
sans y être autorisé par le mari qu’en … 1965 (1).
Bref, on m’a
sans doute compris : ceux qui affirment que les traditions sont justifiées
par leur longue histoire, qu’on a construit grâce à elles des Civilisations pérennes
et que des peuples s’y nourrissent encore, devraient y songer à deux fois : les
Civilisations elles aussi évoluent.
------------------------------------
(1) Pour ceux
qui veulent se rafraîchir la mémoire, voir ici cet excellent et bref
récapitulatif chronologique des droits des femmes de 1882 à 2006
============================
Annexe.
« La société
préconsumériste avait besoin d'hommes forts, donc chastes. La société de
consommation a besoin au contraire d'hommes faibles, donc luxurieux. Au mythe
de la femme enfermée et séparée (dont l'obligation de chasteté impliquait la
chasteté de l'homme) s'est substitué le mythe de la femme ouverte et proche,
toujours à disposition. Au triomphe de l'amitié entre hommes et de l'érection
s'est substitué le triomphe du couple et de l'impuissance. Les hommes jeunes
sont traumatisés par l'obligation, que leur impose la permissivité, de faire
tout le temps et librement l'amour. » Pier Paolo Pasolini
No comments:
Post a Comment