Il faut qu’il y ait des malheureux dans le monde ?
Sade
– Les 120 journées de Sodome
Commentaire
2 –
Je reprends le commentaire de ce petit texte (cf. Annexe) déjà abordé hier (24juin), et qui suggère que la nature veut le malheur de certains et le bonheur
des autres, que c’est là son décret et qu’à vouloir le corriger on ne ferait
que semer le désordre.
On peut révoquer cette idée d’une volonté de la nature, et
affirmer que la nature n’est pas une « personne » douée de volonté –
voire même de sensibilité – mais un
ensemble de lois, de normes, ensemble
dont peut douter d’ailleurs qu’il forme un tout cohérent : n’y
aurait-il pas plutôt des
natures ?
Et si les lois en questions n’existaient que séparément,
sans liens forts entre elles ? Si leur harmonie n’était que
coexistence ? Si après avoir modifié l’une nous n’avions qu’à adapter les
autres ? Bref, si nous n’avions pas besoin de nous faire démiurges, mais
simplement planificateurs intelligents ?
Reprenons l’exemple évoqué hier : celui de la densité
de population humaine en Afrique qu’on augmenterait de façon catastrophique si
l’on voulait apporter aux africains les progrès modernes. Peut-on donner un
chiffre maximum tolérable pour cette population compte tenu du
milieu ? Non, bien sûr, parce que
cette densité humaine maximum dépend du niveau de développement des techniques
vivrières : lorsque les Hollandais débarquèrent pour la première fois en
Australie, on estime à 500000 le nombre des aborigènes qui y vivaient. Autant dire
que cet immense territoire ne pouvait faire vivre qu’un demi-million d’être
humains. Aujourd’hui il en fait vivre 23 millions et ce n’est sans doute pas un
maximum. (1)
Bref : la Nature n’existe pas ; seules existent
des lois naturelles.
Mais si l’on revient au texte de Sade, on devine que son
propos était beaucoup plus simple et immédiat : pour Sade, il faut bien
qu’il y ait des malheureux pour qu’existent des gens heureux. Autrement dit,
c’est un propos de psychologie – ou de morale sociale.
Mais ça, nous attendrons un peu pour en parler.
A
après-demain – si vous le voulez bien !
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(1) Je ne dirai rien de la population de la Palestine avant
et après son occupation par le peuple israélien pour ne pas susciter de
polémiques qui nous éloigneraient de notre sujet.
Annexe.
« Je maintiens qu’il faut qu’il y ait des malheureux
dans le monde, que la nature le veut, qu’elle l’exige, et que c’est aller
contre ses lois en prétendant remettre l’équilibre, si elle a voulu du
désordre. […] L’univers ne subsisterait pas si la ressemblance était exacte
dans tous les êtres ; c’est de cette dissemblance que naît l’ordre qui conserve
et qui conduit tout. »
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